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30 mars 2014 7 30 /03 /mars /2014 19:54

«Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles.»

Sénèque l'Ancien

Treize mille policiers mobilisés et aidés par 7000 militaires, 5000 membres de délégations et 3000 journalistes, un budget global de 24 millions d'euros pour l'événement, pour le Sommet nucléaire mondial, qui a eu lieu lundi 24 et mardi 25 mars. Ce sommet s'est déroulé en présence des présidents américain et chinois. Le président russe en revanche a été absent. Un sommet dominé justement par la crise ukrainienne. La Russie est restée insensible à la menace de nouvelles sanctions brandie par les Occidentaux qui ont confirmé hier l'annulation du sommet du G8 prévu en juin à Sotchi.


De quoi s'agit-il?

Le secrétaire général de l'ONU a été le premier à parler des buts de la conférence. Il a déclaré qu'il était indispensable de renforcer la coopération internationale et il a appelé les dirigeants à prendre des mesures pour travailler ensemble pour un monde plus sûr.

«Aujourd'hui, je vous appelle à agir toute de suite. N'attendez pas que d'autres fassent le premier pas. Notre défi est celui du leadership», «Travaillons ensemble pour un monde plus sûr pour tous, un monde libre d'armes atomiques et de la menace du terrorisme atomique», a-t-il ajouté. Selon lui, les gouvernements nationaux sont les premiers responsables pour éviter que des groupes terroristes acquièrent des armes atomiques, qui sont les armes de destruction massive les plus dangereuses. «La coopération et l'assistance internationales sont indispensables», a souligné le chef de l'ONU en ajoutant que le renforcement de la sécurité nucléaire et la mise en place d'une culture de sécurité nucléaire sont prioritaires.
M. Ban a souligné que l'ONU a un rôle important à jouer dans trois domaines en particulier, dont le renforcement du cadre international de la sécurité nucléaire, le renforcement des capacités des États à détecter et à mettre fin au commerce illicite des matériaux nucléaires et radiologiques et les efforts pour le désarmement nucléaire. «La non-prolifération et le renforcement du contrôle des matériaux nucléaires sont importants, mais pas suffisants pour offrir une garantie contre la pire des menaces, à savoir l'usage d'armes nucléaires à l'avenir», a déclaré le Secrétaire général.

Les dirigeants présents ont discuté des mesures susceptibles de renforcer la sécurité nucléaire et d'empêcher les terroristes de s'emparer de matériaux nucléaires. Les dirigeants ont exprimé leur satisfaction en constatant que la majorité des engagements pris lors de ceux-ci avaient été tenus. Le communiqué conjoint du Sommet souligne la nécessité d'une architecture mondiale puissante et globale garantissant la sécurité nucléaire avec, en son centre, l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea). Il affirme également que les mesures destinées à renforcer la sécurité nucléaire n'affectent pas les droits des pays de développer et d'utiliser cette énergie à des fins pacifiques.


Le sommet de La Haye renforce la prévention contre le «terrorisme nucléaire»
Selon le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, des «mesures importantes» ont été adoptées en regard des trois objectifs du sommet: réduire le nombre de matériaux nucléaires dangereux, améliorer la sécurité de ces matériaux et améliorer la coopération internationale.
Certains États ont néanmoins voulu aller plus vite que les autres, à l'image des 35 qui se sont engagés à appliquer des standards internationaux plus stricts que ceux adoptés dans le communiqué final, et à renforcer leur coopération.

Cette initiative a été lancée par les États-Unis, les Pays-Bas et la Corée du Sud, puis signée par 32 autres pays, dont la France, la Turquie, l'Ukraine et Israël. Selon le Groupe sur les matériaux fissiles, un groupe d'experts sur le nucléaire, «l'absence de la Russie, de la Chine, du Pakistan et de l'Inde, tous des pays disposant de l'arme nucléaire et d'un stock fourni de matériaux nucléaires, affaiblit l'impact de ce texte».

La lutte contre la menace terroriste nucléaire est au coeur de l'héritage politique que souhaite laisser le président américain Barack Obama, qui avait lancé le premier Sommet sur la sécurité nucléaire en 2010 et devrait accueillir la 4e édition en 2016 à Washington. L'enjeu est de taille car «il y a presque 2000 tonnes de matériel, prêt à être utilisé dans une arme, en circulation dans le monde», avait rappelé le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte. (1)

Parallèlement, le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea) s'est réuni en janvier. Le Plan d'action commun a été adopté en novembre par l'Iran, la Chine, la France, l'Allemagne, la Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis pour assurer que le programme nucléaire iranien soit uniquement à des fins pacifiques. «L'Aiea est prête à mener les vérifications et le suivi des mesures prévues par le plan d'action commun ».

Curieusement, Fukushima n'a servi à rien. Les changements climatiques ne sont plus la priorité. Même les pays européens se sentent moins liés par les contraintes d'autant que l'obsession de la dépendance au gaz russe les amène à revenir sur leurs anciennes promesses et il n'est pas interdit que les gaz de schiste puissent s'installer définitivement comme alternative, voire même que l'Allemagne revienne sur sa décision de fermer ses réacteurs. Le nucléaire revient sur le devant de la scène. il faut savoir que plus de 70 réacteurs sont en construction dont 40% en Chine. Bien que le problème des déchets nucléaires ne soit toujours pas réglé, chaque pays se débrouille (vitrification, enfouissement, largage en mer...).


Ce qui a été «oublié» pendant ce sommet

En fait rien n'a été dit sur les voies et moyens de doter les pays pour pister le nucléaire terroriste qui dit-on, avec une bombe sale peut provoquer une catastrophe. Il faut bien reconnaître que depuis l'effondrement de l'Union soviétique considérée à tort comment étant la source du commerce illégal d'uranium, il n'y a pas eu de scoop de découverte spectaculaire d'uranium, encore moins de passage à l'acte attribué d'une façon insidieuse à des terroristes islamiques eux seuls capables de passer à l'acte

Par contre, pas un mot sur l'utilisation de l'uranium appauvri dans les obus pendant les dernières guerres. Les nations productrices recyclent ces déchets dans des munitions autrement plus dangereuses pour la santé puisqu'elles sont capables de percer des plaques de blindés.. Dans ce cas, Ban ki-moon est muet: «Circulez, il n'y a rien à voir!» Les milliers de personnes mortes, les milliers de personnes estropiées ou naissant avec des malformations congénitales n'avaient pas d'avocats à ce sommet. De même, les irradiés du Sahara algérien attendent toujours qu'on leur rende justice. Les apprentis sorciers de l'atome font payer aux nations faibles leur mégalomanie prométhéenne. Rendront-ils compte un jour?

Par contre, pas un mot sur le danger du stockage des déchets nucléaires qui ont une demie-vie de 24.000 ans- Cela veut dire qu'au bout de 24.000 ans il restera la moitié de l'uranium initial- On fait dans la diversion: les pays ayant des réacteurs nucléaires (une trentaine) vont améliorer les règles de sécurité. Ainsi, le patron de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea) a indiqué le 17 mars à Tokyo que l'organisme allait continuer d'améliorer ses normes à la lumière de l'accident de Fukushima, tout en prévenant qu'une centrale nucléaire ne pouvait jamais être sûre à 100%. «Ce qui est important pour la sûreté, c'est que le processus soit évolutif. Nous avons besoin d'améliorer la sûreté continument, sans tomber dans l'autosatisfaction», a-t-il insisté.«Toutefois, une catastrophe naturelle peut arriver n'importe où dans le monde... la sécurité à 100% n'existe pas», a-t-il ajouté. «Ce que nous pouvons faire est de prévenir autant que faire se peut les accidents potentiels pour en atténuer les conséquences.» (2)


Les convictions et les efforts de l'Algérie

Le Premier ministre, Youcef Yousfi, a intervenu au Sommet: ««Un cadre transparent basé sur le partage d'informations scientifiques et techniques, un retour complet d'expérience et une coopération accrue à l'échelle régionale et internationale sont nécessaires pour faire progresser nos efforts collectifs», «Au-delà de l'adhésion aux textes réglementaires en matière de sûreté et de sécurité nucléaire, il importe de souligner le caractère primordial que revêt la coopération internationale en tant qu'instrument privilégié pour le renforcement des capacités, y compris dans les domaines de la criminalistique nucléaire et du cybercrime (...) » (3)

« L'Algérie est partie prenante de ce processus conçu pour être une réponse commune aux risques et menaces transfrontalières sur la sécurité et la stabilité des Etats que font peser les acteurs non étatiques, notamment les groupes terroristes». Il a également plaidé pour l'«universalisation» des instruments juridiques internationaux, notamment le Traité de non-prolifération (TNP)». (3)

«L'Algérie «s'est dotée de mesures permettant des évaluations périodiques régulières pour tester et améliorer les plans nationaux de sécurité (...) Au plan régional, un centre pour la région africaine et arabe a été mis en place en février 2012. L'Algérie abrite aussi le secrétariat régional pour l'Afrique du Nord des centres d'excellence sur les risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques, initiés par l'Union européenne.» «L'Algérie se déclare prête à poursuivre ses efforts en matière de sûreté et de sécurité nucléaire en veillant également au renforcement de la libre circulation des flux de connaissances scientifiques et techniques et au transfert des équipements et technologies indispensables au progrès et au développement socio-économique, dont nos pays ont besoin. Rien ne saurait justifier une quelconque entrave au droit inaliénable à l'utilisation pacifique de l'atome, garanti par le TNP, dès lors que sont respectés les engagements en matière de non-prolifération.» (3)

Le thorium peut- il être le combustible de l'avenir?

Les inquiétudes se font quant au déclin des réserves en oxyde d'uranium. La solution miracle est peut-être le thorium. «Ressource abondante à fort potentiel énergétique, moindre quantité et dangerosité des déchets: le thorium pourrait soutenir le développement d'une nouvelle filière nucléaire, mais ce minerai vu par ses partisans comme du nucléaire «vert» ne constitue pas forcément une solution miracle. Le thorium est trois à quatre fois plus abondant dans la croûte terrestre que l'uranium, et notamment chez les pays qui sont susceptibles de construire des réacteurs dans le futur, comme l'Inde, le Brésil et la Turquie», explique Martha Crawford-Heitzmann, directrice de la recherche, du développement et de l'innovation du géant français du nucléaire Areva. Areva a signé avec le belge Solvay, en décembre, un accord incluant un programme de recherche et de développement pour étudier l'exploitation de ce minerai comme combustible potentiel de centrales nucléaires.» (4)

Si les recherches reprennent aujourd'hui, c'est parce que l'abondance de la ressource profiterait à certains pays, comme l'Inde qui, avec environ un tiers des réserves mondiales, s'est clairement engagée dans la voie du thorium dans le cadre de son ambitieux programme de développement nucléaire civil. Principal inconvénient du thorium: il n'est pas naturellement fissile, contrairement à l'uranium 235 utilisé dans les réacteurs actuels. Résultat: la production industrielle d'énergie grâce au thorium n'est pas pour demain.(4)


Ce que je dis à propos du nucléaire en Algérie

Régulièrement, on parle du nucléaire en Algérie dans un discours à consommation interne pour faire croire que nous avons la maîtrise de l'atome. Honnêtement, nous en sommes loin. Certes, nous disposons de deux réacteurs de recherche pour fabriquer des isotopes pour la chimiothérapie et l'industrie pétrolière. Nous avons des difficultés à nous alimenter en matériaux fissiles bien que nous soyons de bons élèves de l'AIEA. Pour rappel, Boumediene avait refusé de signer le TNP, il parlait de dénucléarisation totale de la région Mena y compris Israël. Pendant la décennie noire, acculée de toute part étant accusée de faire la bombe, l'Algérie a signé le TNP pour couper court à toutes les rumeurs déstabilisatrices.

L'Algérie ne doit pas pratiquer la politique du zéro nucléaire, mais il faut savoir qu'une centrale dans les pays développés demande dix ans entre le moment de sa conception et sa mise en marche. Ses réserves de 50.000 tonnes de U308 peuvent lui permettre à terme d'intégrer le nucléaire dans un mix énergétique L'Algérie n'a pas encore de stratégie énergétique globale. Les effets d'annonce ne résistent pas à la dure réalité. D'après l'AIE, le peak oil algérien aurait été dépassé. Partant du postulat que la manne pétrolière n'appartient pas qu'à nous. Elle appartient en priorité aux jeunes générations qui seront là en 2030/2050 quand le pétrole et le gaz naturel ne seront plus là pour masquer nos errances et notre refus de mettre en place maintenant - demain il sera trop tard, car nous avons une génération devant nous pour démarrer un plan Marshall qui tourne le dos au tout fossile - une stratégie énergétique pérenne avec au préalable un état des lieux de ce que nous avons réellement comme ressources: fossiles, uranium, géothermie, gisement solaire et éolien, charbon, hydraulique, biomasse...

La stratégie énergétique est donc l'affaire de tous. A titre d'exemple, il est connu, d'après l'Aprue, que nous pouvons faire sans problème et par une politique volontariste issue de cette stratégie 20% d'économie d'énergie. La génération de 2030- à qui il faut laisser un viatique en énergie fossiles- aura à sa disposition un bouquet énergétique qui lui permettra de solliciter toutes les énergies et, de plus en plus, les énergies renouvelables et de moins en moins les énergies fossiles. Il faudra également remettre en oeuvre le Barrage vert qui est capable de nous aider à combattre les changements climatiques, de diminuer notre facture alimentaire, mais aussi de nous procurer du bois, gisement de biomasse évalué actuellement à 3 millions de tep/an. S'agissant du gaz de schiste, il devrait être mis en oeuvre impérativement après avoir assaini la scène énergétique par un modèle énergétique flexible et respecté et après s'être assuré que la technologie est respectueuse de l'environnement. L'avenir de l'Algérie est dans l'intelligence. Comment la solliciter et faire émerger, notamment en réhabilitant la formation d'ingénieurs et de techniciens qu'il faudra former en quantité et en qualité. Car c'est la seule légitimité qui permettra à l'Algérie de tenir son rang dans un monde de plus en plus chaotique. L'éco-citoyenneté est un combat qui commence à l'Ecole. (5)


1. http://www.liberation.fr/monde/2014/03/25/a-la-haye-35-pays-s-engagent-a-renforcer-leur-securite-nucleaire_990036


2. http://www.goodplanet.info/actualite/2014/03/17/aiea-la-securite-100-nexiste-pas-dans-centrale-nucleaire/#sthash.dVwjbMyr.dpuf


3. Discours du Premier ministre Youcef Yousfi au sommet de La Haye 25 mars 2014


4. http://www.goodplanet.info/actualite/2014/02/17/le-thorium-combustible-nucleaire-du-futur/#sthash.hMJ3DgbI.dpuf


5. http://www.econostrum.info/Pr-Chems-Eddine-Chitour-Je-suis-convaincu-que-le-nucleaire-ne-pourra-pas-etre-la-solution-aux-problemesenergetiques_a5088.html#ixzz2 x37xWZ4x

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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30 mars 2014 7 30 /03 /mars /2014 14:26

«Le meilleur moyen de contrôler une révolution est de la faire soi-même» Machiavel (Le Prince)

Il y a trois ans démarrait la tragédie libyenne qui s'est soldée quelques mois plus tard par le lynchage abject d'El Gueddafi en direct avec une joie morbide des médias occidentaux qui jubilaient de donner en pâture à leurs opinions publiques l'image dégradante d'un leader arabe musulman et qui, quelques années plus tôt, était accueilli avec les honneurs à l'Elysée. Tout démarra, on s'en souvient avec une jacquerie du peuple qui se révolta contre un dictateur au pouvoir depuis plus de quarante ans et qui était parti pour faire de la Libye une Djamahiriyya dynastique à l'instar d'ailleurs, de tous les potentats arabes sans exception pour qui le pouvoir est octroyé par Dieu à eux les sauveurs, les « Mahdis » de leurs peuples.

On l'aura compris, il est rare que les transitions soient apaisées en pays arabe. On dit que le pouvoir change soit par l'émeute, soit par la mort naturelle du dirigeant. Mieux encore, l'acharnement se poursuit. Extradé par le Niger, le fils de l'ancien chef d'Etat libyen, Saadi El Gueddafi, qui a été photographié par les autorités de Tripoli le 6 mars à son arrivée en prison, aurait été sauvagement torturé par le nouveau régime de Tripoli. Il serait dans le coma.
La situation en Libye nous interpelle à plus d'un titre. Ce sont d'abord des hommes qui souffrent qui ont les mêmes espérances, à savoir une vie de paix et de dignité. La situation reste chaotique près de deux ans et demi après la mort d'El Gueddafi, de nombreuses milices qui n'ont pas désarmé, empêchant le gouvernement central d'imposer son autorité à travers le pays. C'est ensuite un pays frontalier qui, a bien des égards, par son arsenal ouvert à tout vent pose, à l'Algérie des problèmes de sécurisation des frontières.



La genèse du chaos

On a tout dit de la « punition » libyenne. Notamment du détournement de la Résolution onusienne 1702 qui ne donnait pas mandat pour bombarder le pays et tuer El Gueddafi, mais pour mettre en place une zone d'exclusion aérienne. Petit détail: quatre heures après le vote de la résolution, les avions français commençaient à bombarder...

Je veux dans cette contribution rapporter en honnête courtier l'apport humaniste de Bernard-Henry Lévy tout en m'interrogeant sur son silence assourdissant devant la situation tragique actuelle. Pour cela je vais m’appuyer sur quelques commentaires sur son ouvrage sur la Libye, puis sur son film. Il faut bien vivre même de la misère et de la tragédie des autres...

Nous lisons sous la plume de J.E. Ducoin : «Toute victoire individuelle sur l'esprit collectif étant une régression, ne prenons pas l'exercice qui suit à la légère. Lorsque Bernard-Henri Lévy veut jouer un rôle politique, le chemisé de blanc n'hésite pas à sortir sa plume, quitte à la confronter à l'ironie des canons; le philosophe n'en est pas moins médiacrate. Une guerre se déclare? BHL prépare son sac de voyage et prévient son éditeur. Cette fois, il aurait fallu s'exiler sur Mars pour ne pas remarquer son activisme lors du conflit entre l'Otan et la Libye de Kadhafi. Résultat, sitôt l'ultime «coup de feu» tiré, un pavé de 640 pages au titre évocateur, la Guerre sans l'aimer(Grasset), récit ultra-«bhlien» qui aurait dû s'intituler «Ma campagne de Libye». L'homme, plus narcissique que jamais - quel autre héros que lui-même? -, met en scène ce qu'il souhaiterait être sa posture romantique dans l'Histoire quand il ne s'agit trop souvent que de l'histoire de sa propre posture. N'est pas Malraux ou Chateaubriand qui veut».(1)

«Pour un écrivain, poursuit J.E. Ducoin ,les commencements sont toujours magnifiques - mais attention à ne pas prendre ses désirs pour des réalités. S'il nous donne l'illusion d'entrer de plain-pied dans les coulisses de l'Histoire, alors que son «je» figure à chacune des pages - un jour mangeant du mouton au riz graisseux dans le désert avec des chefs de tribu, le lendemain dînant dans un restaurant chic parisien, etc. -, nous restons confondus lorsqu'il lance cette adresse au peuple réuni à ses pieds sur la corniche de Benghazi: «Jeunesse de Benghazi, libres tribus de la Libye libre, l'homme qui vous parle est le libre descendant d'une des plus anciennes tribus du monde...» L'effet comique ne suffisant pas. Pour BHL, «tout» est relaté et «tout» est réel dans cette chronique, que ce soient les tractations avec ceux qu'il nomme «les révolutionnaires», ou, dans les coulisses du pouvoir, lors de ses entrevues à l'Élysée, son évidente maîtrise à convaincre Nicoléon que celui qui a raison, c'est lui, et personne d'autre! » (1)

« D'ailleurs, conclut J.E. Ducoin, le philosophe et le prince-président paraissent ici à l'unisson, sans qu'on ne sache plus bien qui devient le concierge de l'autre au coeur de cette hystérie de prises de décision. (...) Le philosophe dresse de lui un portrait pour le moins flatteur, «faisant mentir ainsi bien des idées reçues le concernant» (dixit). (...) je suis dans un rôle où il ne s'agit plus ni de commenter, ni de célébrer, ni, encore moins, de s'extasier, mais d'influer». À la toute fin du livre, il dénonce - enfin - le lynchage de Kadhafi. Mais il ne s'interroge ni sur les curieux rebelles qu'il a soutenus, ni sur la légitimité de cette guerre de type néocoloniale, ni, encore moins, sur les racines de son propre discours de «justesse» et de «justice» de cette guerre comme façade idéologique: celle d'un moralisme politique, versus celle d'une authentique «morale politique» (Kant), Pathétique orgueil de vouloir jouer un rôle dans l'Histoire immédiate».(1.)



La Libye trois ans plus tard: un pays à l'abandon

Le Journal Le Monde qui a été un des premiers boutefeux se fend d'un mea culpa superficiel: «Il y a trois ans, lit-on le 19 mars 2011, l'aviation française, bientôt secondée par la Royal Air Force, l'une et l'autre appuyées par les Etats-Unis, intervenait en Libye. Essentielle pour appuyer les rebelles libyens qui combattaient au sol, cette opération débouchait, en octobre de la même année, sur la mort du dictateur Mouammar Kadhafi et l'effondrement de son régime. Triste anniversaire: la Libye est aujourd'hui un pays à la dérive, peut-être au bord de l'implosion.» (2)

« Victorieux, l'opposition et les groupes de rebelles armés n'ont jamais su s'entendre pour administrer la Libye - immense contrée de quelque huit millions d'habitants, s'étirant de la Méditerranée aux déserts de l'Afrique subsaharienne. Aucun gouvernement solide n'a pu être formé. La semaine dernière, le dernier à avoir occupé le poste de Premier ministre, Ali Zeidan, a pris la fuite, destitué par le Parlement. On lui reproche d'avoir été incapable de reprendre le contrôle des installations pétrolières du pays, notamment des terminaux de la côte orientale, aux mains de groupes armés. Signe de l'invraisemblable chaos régnant dans le pays, les exportations pétrolières se sont effondrées: d'un million et demi de barils/jour en 2011, elles sont passées à 235.000, selon la compagnie d'Etat, la NOC. Dans les grandes villes, l'insécurité atteint des records. Il n'y a plus de ministre de l'Intérieur. Milices et bandes armées tiennent la rue, cocktail de grand banditisme et d'islamisme. Ironie amère de l'Histoire: Londres, Paris et Washington déconseillent à leurs ressortissants de se rendre en Libye.(2)

Que font les Occidentaux après avoir occis El Gueddafi?

Dans son analyse, le journal Le Monde rapporte les propos du journaliste Patrick Cockburn l'un des meilleurs spécialistes du Proche-Orient, dans The Independant: «L'un des traits les plus stupéfiants des événements de Libye aujourd'hui est le peu d'intérêt qu'ils suscitent de la part de ces pays qui partirent si allégrement en guerre en 2011.» Selon Human Rights Watch, les milices retiennent quelque 8000 personnes dans leurs prisons où la torture serait routinière. Ces milices s'affrontent volontiers les unes les autres, et cette bataille prend, chaque jour davantage, l'allure d'un conflit destiné, in fine, à séparer l'est de l'ouest du pays. Ce triste tableau n'a pas pour objet de porter un jugement a posteriori sur l'intervention occidentale, encore moins de minimiser ce qu'a été la dictature de Kadhafi.»(2) «Soutenue par la Ligue arabe et l'ONU, l'opération de 2011 - que Le Monde a défendue - a été décidée dans un moment singulier: on pouvait raisonnablement craindre un massacre de grande ampleur dans la ville de Benghazi. Mais la réalité de la Libye d'aujourd'hui amène à poser cette question: peut-on se désintéresser à ce point d'une situation que l'on a, à tort ou à raison, quelque peu contribué à créer?» (2)

On peut raisonnablement craindre la disparition de l’Etat libyen. Peut être -croyant au miracle- nous verrons un soutien du journal Le Monde un nouveau BHL véritable Tintin des démocrates ,qui a dit-on essayé ses talents sur les barricades de Maidan à Kiev et qui dit-on a vite déchanté. Les Ukrainiens ne sont pas de la chair à canon! Ce ne sont pas des Arabes. Avec tout cela comporte de connotation raciste dans l’imaginaire de ceux qui –après avoir ouvert la boite de Pandore en mettant la Libye à feu et à sang- ont décidé de ne rien décider à propos de la situation, actuelle chaotique en Libye.

Parmi les créateurs du chaos La France a une responsabilité dans la tragédie libyenne. Elle n'avait pas de mandat pour bombarder le pays et renverser le régime. À côté, l'annexion soft de la Crimée est empreinte d'humanisme, de légalité et de compassion. Les Libyens vivent aujourd'hui un enfer, en comparaison duquel la dictature d'El Gueddafi était un paradis. Et personne n'assume! Les armes sont partout en Libye et aux mains des terroristes qui ont filé au Mali. Le chaos règne dans ce pays qui devient de plus en plus pauvre.



La partition en marche


Depuis la chute du régime du colonel Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est confrontée à une forte instabilité politique, des tendances séparatistes et à des violences incontrôlées dans un contexte de prolifération des armes, qui rendent impossible son essor économique. On apprend en définitive, que les forces spéciales de la marine américaine ont pris le contrôle dans la nuit de dimanche à lundi 17 mars du Morning Glory, un pétrolier qui tentait d'emporter du brut acheté illégalement aux rebelles libyens de l'est du pays.


L'impossibilité du pouvoir central à pouvoir s'entendre avec les différentes régions a amené le chaos. Cette contribution sans concession du journal Le Monde qui après avoir soufflé ad nauséam, ,en son temps sur les braises, fait un constat amer non dénué d’hypocrisie: «Le gouvernement autoproclamé de la Cyrénaïque (est), bras politique de la rébellion, a annoncé au cours d'une cérémonie le début des exportations de brut depuis le port d'Al-Sedra, qu'il bloque depuis juillet. «Nous annonçons aux Libyens et au monde entier que nous avons entamé les exportations du pétrole», a déclaré Abd-Rabbo Al-Barassi, président du bureau exécutif de la Cyrénaïque, «nous ne défions pas le gouvernement ni le Congrès [Parlement]. Mais nous arrachons nos droits», a-t-il dit en dénonçant la marginalisation de sa région. Depuis juillet 2013, les autonomistes de l'Est libyen bloquent des sites pétroliers dans cette région, suspendant les exportations de brut et privant ainsi le pays de sa principale source de revenus. Leur chef, Ibrahim Jodhrane, autoproclamé en août président du bureau politique de la Cyrénaïque, avait initialement accusé le gouvernement de corruption. Après l'échec de médiations entreprises par des tribus et des responsables locaux, le gouvernement a menacé à plusieurs reprises de recourir à la force pour libérer les sites bloqués, sans toutefois passer à l'action. Il avait même menacé de bombarder tout bateau qui s'approcherait des ports pétroliers sans être lié par un contrat avec la NOC. (2)

On le voit, la force n'est pas payante. Le rêve d'une Libye unie est devenue une vue de l'esprit. La solution intermédiaire du fédéralisme ne semble pas convenir au pouvoir central. Pourtant, «les partisans du fédéralisme affirment agir sur la base de la Constitution de 1951 qui divisait le pays en trois régions: la Cyrénaïque, la Tripolitaine (ouest) et le Fezzane (sud), avant la suppression du système fédéral en 1963. «Nous n'oeuvrons pas à une partition du pays, a assuré M.Al-Barassi. Les revenus du pétrole seront répartis sur les trois régions», a-t-il dit, promettant la transparence des transactions. Le blocage des ports pétroliers a provoqué une chute de la production de pétrole à 250.000 barils par jour, contre près de 1,5 million b/j auparavant. (2)

L'appel sans écho des autorités de la Libye

L'ex-Premier ministre libyen Ali Zeidan se serait réfugié en Europe quelques heures après avoir été destitué par le Congrès général national (CGN, Parlement du pays). Le gouvernement libyen accuse pour la première fois publiquement des «groupes terroristes» d'être derrière des dizaines d'attaques et d'assassinats contre les services de sécurité et les Occidentaux, survenus ces derniers mois dans l'est du pays. «La communauté internationale et les Nations unies en particulier à fournir l'appui nécessaire pour éradiquer le terrorisme dans les villes libyennes. La nation se trouve dans une confrontation avec des groupes terroristes, et il incombe au gouvernement de mobiliser ses forces militaires et de sécurité pour lutter contre ce fléau. les villes de Benghazi, Derna (est) et Syrte (centre) et d'autres font face à une guerre terroriste menée par des éléments libyens et étrangers aux programmes hostiles.» Les autorités libyennes n'ont pas mentionné un groupe spécifique, mais les villes citées sont des fiefs connus de plusieurs groupes extrémistes, dont en particulier le groupe Djihadiste d'Ansar Asharia.(3)

L'avenir de la Libye : Etat fédéral ou partition ?

«Il ne suffit pas de changer le chef du gouvernement, Ali Zeidan, pour éloigner la perspective d'un éclatement de la Libye, minée par les appétits pétroliers des tribus et des clans. 80% des ressources pétrolières sont situées surtout dans l'est du pays alors que le gouvernement siège dans l'Ouest! L'existence d'une Libye unifiée paraît de plus en plus compromise (...) le gouvernement de l'Iklim de Barqua, était décidé à camper sur ses positions, le pouvoir en Libye doit se situer là où se trouvent les richesses pétrolières. C'est au gouvernement de l'Iklim de Barqua de décider du partage de la manne aux autres régions. Par ailleurs, on apprend que les figures de proue des grandes villes de l'Est libyen se sont rendu au Caire, Ils ont rencontré le maréchal Abdel Fattah El- Sissi. Ce dernier, disait un des membres de cette délégation issu de la tribu El- Obeidate, aurait promis à ses visiteurs que l'Egypte soutiendrait les revendications légitimes de ses voisins, notamment dans leur lutte contre «les provocations» des terroristes islamistes. Le soutien égyptien consolide l'Iklim de Barqua face aux autres dirigeants libyens.» (4)


Où est l'identité libyenne dans tout cela? Est-elle indexée sur le pétrole? «Cet excrément du diable» disait Hugo Chavez. Il est fort à parier qu'à moins d'un miracle, la partition est en route. Le chaos promis en son temps par Candy Rice est en marche, la construction c’est pour plus tard…. La Libye sera le troisième pays arabe après l'Irak (de facto) et le Soudan à faire les frais du Mepi et avant les préparatifs prochains pour découper le Yemen en six régions, la Syrie et plus tard l'Egypte avec la création d'une enclave copte, et pourquoi pas l'Algérie.

Ne croyons pas que nous sommes indemnes ! . Nous devons plus que jamais militer avant toute chose, avant l'économie, avant les logements, pour l'unité, les libertés. Cela passe par une école performante, une culture de qualité mais aussi des espaces de brassage comme le faisait en son temps le Service national.



1. La guerre en Libye racontée par Bernard-Henri Lévy. Ou comment le «moi-je» devient la trame d'un récit d'aventure - tout le contraire d'un livre d'Histoire. http://larouetournehuma.blogspot.com/2011/11/histoires-libye-quand-bhl-devient-le.html


2. http://www.lemonde.fr/libye/article/2014/03/19/la-libye-trois-ans-plus-tard-un-pays-a-l-abandon_4385568_1496980.html


3. La Libye veut s'attaquer frontalement au terrorisme Le Monde.fr avec AFP 20.03.2014
4. http://mondafrique.com/lire/economie/2014/03/12/la-guerre-autour-du-partage-du-pactole-petrolier-fait-rage-en-libyei

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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22 mars 2014 6 22 /03 /mars /2014 17:04


«L'Empire n'a pas d'alliés, il n'a que des vassaux»

Parole attribuée à Ignacio Ramonet ancien directeur général du « Monde Diplomatique »

Il est connu que les civilisations sont mortelles comme l’écrit Paul Valéry. Il en est de la civilisation européenne qui, apparemment, donne des signes du déclin. Avec l’Empire américain c’est autour de l’Europe de vivre un drame existentiel . Nous allons tenter dans cette contribution d'apporter quelques lumières sur l'anomie européenne due à une cacophonie de 28 voix toutes plus dissidentes les unes que les autres sur des sujets aussi bien politiques économiques que culturels voire éthiques avec en plus les conséquences d'un alignement aveugle sur les Etats-Unis.

L'Europe actuelle est exsangue, revancharde, hargneuse, elle donne en pâture à ses extrêmes, les allogènes que sont les émigrés scories du guerroyage colonial des Empires anglais, français et à un degré moindre, belge, néerlandais et allemand. Dans tout ce marasme, seule l'Allemagne avec sa puissance politique et surtout économique tente de garder sa tête hors de l'eau. La France de Hollande qui joue les va-t-en-guerre en Syrie et qui a eu à rétropédaler la France de Sarkozy et de BHL qui a détruit la Libye et participé au lynchage abject d'El Gueddafi. Où en est - à titre d'exemple - la France de De Gaulle qui a su et pu se dresser contre l'Empire et l'hyperpuissance, selon le bon mot d'Hubert Védrine ancien ministre des Affaires étrangères.

L'Europe qui s'était fabriquée une réputation de sanctuaire des droits de l'homme et de la liberté avec les «Lumières»- qui furent un siècle des ténèbres, pour les nations colonisés- l'Habéas Corpus, la déclaration de 1789, est en train de perdre son âme. Nous le voyons avec la législation drastique pour traquer les sans-papiers mais pas sans dignité véritable pour les damnés de la terre à qui frappe au mirage du supermarché européen. Ce fut le chauvinisme de la prospérité comme l’avait noter un philosophe. Et même cela,-à savori la prospérité- appartient au passé. Résultat des courses l’Europe se « droitise de plus en plus » et pour les élites dirigeantes tout est bon pour capter l’électorat fut-il celui de droite. L’essentiel est de durer.


L'apogée du hold up de l'Europe en direction des nations faibles

Si on remonte loin dans l'histoire en ne nous intéressant qu'à ces deux derniers siècles, les Etats européens se sont toujours livrés des guerres (souvenons nous de la guerre de 100 ans entre la France et la perfide Albion). Après la débâcle napoléonienne et sûrement après les Congrès de Vienne, les nations européennes se sont mis d'accord pour augmenter leur espace vital en dehors de l'Europe.

Ceci s'est fait d'une façon concomitttante avec ce que l'on appelle la première révolution industrielle qui a vu le développement spectaculaire de l'industrie du charbon avec en parallèle le développement de la sidérurgie et donc l'industrie lourde qui a permis à la fois le développement d'une industrie, notamment des transports (les premiers bateaux à vapeur) et de l'armement. Pendant que le sultan de la sublime porte en était encore au glaive et à la lance, les Européens en étaient aux canons. Résultat des courses: l'homme malade de l'Europe ayant perdu la bataille commença à être attaqué sur la périphérie, l'indépendance de la Grèce est le prélude à la curée qui se termina près d'un siècle plus tard avec les accords anglais de Sykes-Picot sur le cadavre encore fumant de l'Empire ottoman Les deux guerres mondiales ont achevé d'assujettir l'Europe à la remorque américaine à travers l'Otan, exception faite pour la parenthèse de Gaulle qui avait une certaine idée de la France qu’il voulait indépendante aux injonctions de l’Empire, indépendante de la politique occidentale vis-à-vis des Arabes…


Le déclin économique

On sait qu'après une guerre 1939-1945 atroce, l'Europe a été construite grâce au plan Marshall américain qui a permis aussi le développement spectaculaire de l'économie américaine qui voyait dans cette Europe exsangue un marché de près de 200 millions de personnes. Ce fut dit-on les Trente Glorieuses qui permirent le développement de l'Europe notamment de la France avec ce qu’il est courant d’appeler les « tirailleurs bétons » qui après avoir guerroyé pour la France se sont mis ensuite à la reconstruire. On sait qu’elle fut la reconnaissance de la France, vis à vis des émigrés qui furent l’es scories d’une histoire coloniale

Depuis la fin des années soixante dix, l'Europe et notamment la France ne se sont pas relevés.

Le passage de six à 28 partenaires a encore plus problématisé le fonctionnement d'une Europe qui continuait à fasciner alors qu'elle était une coquille vide. Les pays du sud de l'Europe furent les premiers à subir de plein fouet les crises qui proche en proche, gagnèrent les poids lourds (France, Italie, Royaume-Uni). Faut-il imputer le déclin actuel de l'Europe à l'émergence des pays émergents, notamment les pays du Bric'S? Ou est-ce ainsi inscrit dans ses gènes à savoir le déclin comme l'avait montré il y a plus de six siècles le père de la sociologie universelle, Ibn Khaldoun dans sa Muqqadima « les prolégomènes » . Pour lui, les empires connaissent d'abord une apogée fulgurante qui paraît durer 1000 ans, puis graduellement on s'aperçoit d'un affaissement lent et inexorable qui commence par les périphéries et qui gagne graduellement le centre, il en fut ainsi de l'Empire romain, de l'Empire byzantin, la civilisation islamique et plus «récemment», l'Empire ottoman.

S'agissant justement du déclin économique apparemment inexorable , Christophe de Margerie, le dirigeant du groupe pétrolier français Total, n'a pas l'habitude de mâcher ses mots. Ecoutons: le «A l'ouverture du Forum économique mondial de Davos, mercredi 24 janvier, il a estimé devant la presse que «l'Europe devrait être reconsidérée comme un pays émergent» et non «comme une économie avancée au même titre que les Etats-Unis ou le Japon». (...) » (1)

« Le patron de Total estime que l'Europe, dont l'économie se débat dans une croissance molle, un chômage élevé et une inflation très faible, doit «refonder son modèle économique». «Reshaping the world» est d'ailleurs le thème de Davos cette année. «Aujourd'hui nous essayons juste de combattre ceux (les pays émergents qui exportent beaucoup) qui parfois fabriquent le même produit (que nous Européens), moins cher», a-t-il dit, appelant à développer de nouvelles compétences et à rétablir la compétitivité. «Franchement, nous avons besoin d'un nouveau départ. Arrêtons de penser que nous pouvons redémarrer à partir de choses qui ne peuvent plus être sources de développement ou de croissance pour nos pays». «L'Europe est une région qui ne prend pas soin de son avenir», a jugé kenneth Rogoff, professeur d'économie à l'université de Harvard, jugeant que le Vieux Continent risquait de perdre toute une génération.»(1)


La crise avec la Russie : l’erreur de trop

La crise avec la Russie et les menaces sur les fournitures de gaz contraignent les dirigeants européens à un difficile exercice pour maintenir l'UE unie face à Moscou et éviter que s'enlise son ambitieux projet pour le climat.

« Plus que jamais, lit-on sur une cotnribution d’Euractiv, les Européens sont divisés sur les nouveaux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'UE pour 2030 proposés par la Commission européenne. Bruxelles appelle l'UE à réduire pour 2030 ses émissions de 40% par rapport à leur niveau de 1990. Elle prône également de porter à au moins 27% la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique de l'UE et recommande de réaliser 25% d'économies d'énergie.». Première conséquence: plusieurs Etats refusent de prendre un quelconque engagement pour de nouveaux objectifs contraignants de limitations des émissions de gaz à effet de serre. «La réduction de 40% ne fait pas consensus», reconnaît une source française. (...) La Pologne et les pays d'Europe orientale veulent connaître les engagements des autres grands pollueurs, notamment les Etats-Unis, la Chine et la Russie. L'Italie veut que soient prises en compte «les capacités de financement et des capacités de dépense des Etats».(2)

«Mariano Rajoy, a annoncé son intention de batailler pour la réalisation de «Midcat», le projet de gazoduc via la France dont la réalisation vient d'être reportée. La crise avec la Russie lui fournit de nouveaux arguments. «Si Midcat était opérationnel, il pourrait acheminer d'Afrique du Nord l'équivalent de la moitié du gaz qui vient de Russie via l'Ukraine», a-t-il soutenu. «J'espère que nos voisins français vont comprendre.» L'UE dépend considérablement du gaz russe. Gazprom a vendu 133 milliards de m3 aux pays de l'UE en 2013, soit une hausse de 16,3% par rapport à 2012. Ces achats couvrent 25% de la consommation de l'UE, avec de grandes disparités. Les principaux acheteurs ont été l'Allemagne (40 milliards de m3), l'Italie (25,3 milliards) et le Royaume-Uni (12,4 milliards). Et plusieurs Etats -Lituanie, Lettonie, Estonie, Finlande, Pologne, Hongrie, Slovaquie et Bulgarie- sont totalement dépendants des fournitures russes. Cette situation se traduit par une grande frilosité devant la perspective d'une guerre commerciale avec Moscou.» (2)

Les Européens peuvent toujours sanctionner virtuellement, Poutine n'en n'a cure! Il a tous les atouts en main: le gaz, le pétrole, l'uranium, les terres rares, tous les métaux existants y compris les métaux précieux, le charbon, la technologie de pointe y compris militaire, l'agriculture, et ce qui est le plus rare: le soutien du peuple russe qui, contrairement à ce qu'en disent les médias, est totalement derrière lui dans ce bras de fer engagé par la «communauté internationale», c'est-à-dire huit pays sur 220! Les sanctions économiques? La Russie, qui ne manque de rien pour son développement, peut parfaitement vivre en autarcie comme l'U.r.s.s. le fit durant des années, mais je doute que les Européens puissent le supporter longtemps! Mais elle dispose d'un énorme marché d'exportation vers le Sud-Est asiatique depuis des années, et là, pas question d'un blocus, sinon c'est la guerre et il ne faut pas oublier que la Chine et l'Inde sont alliés de la Russie.

Un petit exemple de la puissance déstabilisatrice de la Russie qui vient de décréter il y a un mois un embargo sur le porc européen. La Commission a intimé l'ordre aux pays membres de stopper les contacts bilatéraux avec la Russie à propos de la filière porcine... Ces contacts bilatéraux ne sont guère du goût de la Commission, qui a «intimé l'ordre aux États membres d'interrompre les discussions bilatérales.» Bruxelles a «réclamé que l'UE parle d'une seule voix d'autant qu'il est dans l'intérêt de la Russie de diviser les Européens». (3)



Où va la vieille Europe?

Ce qui se passe depuis quelques mois en Europe préfigure une accélération de l'anomie. Ce lent délitement pluridimensionnel est lié à plusieurs causes à la fois d'autres économiques et financières mais aussi d'ordre éthique avec notamment le débat sur la théorie du genre…

Avec sa lucidité coutumière Hubert Védrine nous donne sa vision de l'Europe. Pierre Haski rapporte ses propos: «L'occasion était donnée par un débat à l'Académie diplomatique internationale -dirigée par Jean-Claude Cousseran autour d'un recueil de textes d'Hubert Védrine entre 2003 et 2009, «Le Temps des chimères» (Fayard). Hubert Védrine parle de chimères. Les «chimères»? De belles idées véhiculées par l'Occident au temps de sa splendeur, comme son «assurance universaliste», le «monopole du leadership occidental», une «vision simpliste du prosélytisme démocratique», le «droit-de-l'hommisme» ou le «manichéisme». Sans oublier le «devoir d'ingérence» cher à Bernard Kouchner, qu'il rapproche du «logiciel caché profond» de l'Occident: «l'évangélisation.» Autant de vaches sacrées occidentales que pourfend l'ancien chef de la diplomatie.» (5)

«(...) Il faut écouter Védrine poursuit Pierre Haski, quand il décrète que ces idées dominantes en Occident ont «échoué» ou ont été «brutalement remises en cause». Et qu'il faut se préparer à un choc plutôt rude dans la partie qui s'engage pour la définition du nouveau monde, comme le laisse présager l'assurance retrouvée de la Chine. Védrine prévient dans la préface de son livre: «Où en sommes-nous en 2009-2010? Dans le temps long, non pas à l'avènement d'un «monde multipolaire» plus juste, plus harmonieux et forcément stable, mais au début d'une longue redistribution des cartes qui prendra la forme d'une bagarre ou, en tout cas, d'une compétition multipolaire.» (...) » (5)

« Hubert Védrine prédit que l'Europe «mourra d'obésité ou de liquéfaction» si elle ne règle pas ses incertitudes. Il s'en prend à ceux qui pensent vivre dans «une grande Suisse». Et il en a autant pour la France, dont il dénonce la «marginalisation intellectuelle». Il s'en prend à «tant d'excès, d'outrances, de panique, de généralisations» dans les débats sur la citoyenneté et l'intégration, ajoutant: «Quelques burqas et la République serait en danger? Pourquoi un tel manque de confiance en soi?» (...)» Cette crise qui fait que l'Europe s'accroche à des rêves du passé a déjà été dénoncée Donald Rumsfeld, parlait lui aussi de la «vieille Europe» qui, à son corps défendant, n'a pas voulu cautionner l'aventure bushienne en Irak. Ce fut son dernier éclair de lucidité ». (5)

Pour l'ambassadeur singapourien Maybubani, auteur d'un remarquable ouvrage sur le «nouveau monde» il est temps de regarder la réalité en face. Il reproche à l'Europe sa myopie, son autosatisfaction et son égocentrisme. Il relève en particulier que l'Europe a failli à s'engager vraiment en faveur de ses voisins: «Ni les Balkans ni l'Afrique du Nord n'ont bénéficié de leur proximité avec l'Union européenne.» Cependant, au XXIe siècle, le déclin de l'Occident en termes d'abandon de ses valeurs qui, en définitive, ne sont pas valables en dehors du sanctuaire européen, a été accéléré en particulier par les États-Unis sous le gouvernement de George W.Bush.

Enfin, dans son essai: «Une brève histoire de l'avenir» paru en 2006, Attali avait mis en garde «... ce n'est pas l'Afrique de demain qui ressemblera un jour à l'Occident d'aujourd'hui, mais l'Occident tout entier qui pourrait demain faire songer à l'Afrique d'aujourd'hui». (4)

Les choses auraient pu se passer autrement si la sagesse avait prévalu. Si après 1989, l'Otan qui comme le Pacte de Varsovie n'avait plus sa raison d'être. L'Empire avait décidé de prendre en otage le monde avec l'aide de ses lieutenants aux ordres. En 1991 lUnion soviétique s'effondrait et avec elle la menace militaire qu'elle représentait. En effet, immédiatement, la Russie nouvelle sabordait le Traité de Varsovie. La réponse des U.S.A est de placer de plus en plus de bases aux frontières avec la Russie. Ce furent les épisodes du démembrement de la Yougoslavie et de la Serbie, puis des ´´révolutions oranges´´ téléguidées depuis Washington. Aujourd'hui, Russie et «Occident» sont à nouveau face à face à l'occasion de la crise ukrainienne.

Souvenons-nous de ces mains tendues... Gorbatchev et sa «Maison commune», Poutine et sa «Grande Europe»... Autant de plaidoyers pour un partenariat euro-russe enterré par les dirigeants inféodés à Washington tels les Tony Blair, Cameron, Sarkozy-Hollande, Fabius avec leur âme damnée Bernard-Henri Lévy. Concrètement, l'Otan divise, émiette le continent... Si elle continue ainsi, les problèmes réels de l'Europe sont devant elle. Un homme d'Etat américain résume magistralement la situation euro-américaine: «Le dollar est notre monnaie, mais c'est votre problème.»

Tout est dit.


1. http://www.latribune.fr/blogs/inside-davos/20140122trib000811230/le-declin-de-l-europe-selon-davos-et-le-patron-de-total.html


2. http://www.goodplanet.info/actualite/2014/03/20/la-crise-avec-la-russie-brouille-les-ambitions-climatiques-de-lue/?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+Goodplanetinfo+%28Les+D%C3%A9p%C3%AAches+GoodPlanet.info+%29#sthash.0d0Y8Y3y.dpuf


3. http://www.euractiv.fr/specialreport-agriculture/lembargo-russe-sur-le-porc-europ-news-534255


4. C.E. Chitour http://www.legrandsoir.info/ Declin-du-sens-Ou-va-la-vieille-Europe.html


5. Pierre: «Quelques burqas et la République serait en danger?» Rue89 26/04/2010

Professeur Chems Eddine Chitour

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20 mars 2014 4 20 /03 /mars /2014 16:33

«Développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes»

(article 1, alinéa 2 de la Charte des Nations unies)

L'actualité a le tournis. Nous retenons notre souffle concernant la situation de la Crimée, les rodomontades sans épaisseur des pays européens et la détermination de Poutine qui a été constant dans sa stratégie malgré tous les coups bas reçus, notamment la tentative de torpillage des jeux de Sotchi. Le dernier épisode de cette bataille sourde est le vote des «Criméens» pour leur indépendance. Vote qui s'est terminé sur un oui massif ce qui a amené Poutine à reconnaitre cela et à accepter le retour vers la mère Patrie de la Crimée. Et ceci en conformité avec l'article 1 alinéa 2 de la Charte des nations Unies


Pour rappel , la Russie a mis son veto à la résolution soumise au Conseil de sécurité de l'ONU décrétant le référendum de dimanche en Crimée. «La France, comme l'Union européenne, ne reconnaîtra pas la validité de cette pseudo-consultation» en Crimée, qui n'est «pas conforme au droit interne ukrainien et au droit international», a déclaré samedi François Hollande. On rappellera au président Hollande que c’est le même droit international qui crée de toutes pièces le Sud Soudan arraché au Soudan, qui crée le Kosovo reconnu par les Occidentaux bien qu'arraché par le fer et par le feu à la Serbie.

Les pays européens étaient d’ailleurs partagés à l’époque nous, nous souvenons de l’Espagne qui avait peur que le précédent du Kossovo pourrait conforter les basques. Même la France n’était pas indemne de reproche. Le statut de Mayotte est il définitif ?


La Crimée est rattachée à la Russie

Conséquence du vote massif en faveur du retour dans le giron russe, le président russe a livré ce mardi au Kremlin un discours offensif sur la situation en Crimée et plus largement sur la crise ukrainienne. Moscou considère que la péninsule est déjà rattachée à la Russie. Le président russe a prononcé un discours sans ambiguïté sur sa vision de la crise ukrainienne au Kremlin ce mardi. Devant le Parlement et les gouverneurs russes, il a ainsi défendu le référendum de dimanche en Crimée et les actions engagées depuis pour rattacher la péninsule à son pays. «Dans le coeur et la conscience des gens, la Crimée était et reste une partie intégrante de la Russie», a notamment affirmé Vladimir Poutine. ««Ne croyez pas ceux qui vous font peur au sujet de la Russie, qui vous disent qu'après la Crimée, vont suivre d'autres régions». Le président russe a par ailleurs accusé les Occidentaux qui «ont franchi la ligne rouge» selon lui en Ukraine. Déclaration qui intervient au lendemain de sanctions prises par l'Union européenne et les Etats-Unis à l'encontre de responsables russes et ukrainiens (pro-russes). (1)



L'Europe et les Etats-Unis prennent des sanctions contre la Russie

L'arme de dissuasion n'a pas tardé, des sanctions sont infligées mais les pays européens se gardent bien de fermer la porte? Ils infligent un premier train...un deuxième train pensant naïvement que Poutine ferait marche arrière Mais chaque pays ne veut pas se mettre à dos définitivement la Russie. «L'Union européenne et les Etats-Unis ont adopté lundi 17 mars des sanctions ciblées contre de hauts responsables russes ou pro-russes pour envoyer selon eux un «message fort» à Moscou au lendemain du référendum de rattachement de la Crimée à la Russie. De leur côté, les ministres européens des Affaires étrangères «viennent de décider des sanctions -restrictions de visas et gels d'avoirs- contre 21 responsables ukrainiens et russes», a déclaré lundi le ministre lituanien Linas Linkevicius, sur son compte Twitter. Linasas Linkevicius a indiqué en revanche que l'UE prendrait des «sanctions supplémentaires dans les prochains jours». Les Européens estiment toutefois qu'il n'est pas trop tard pour qu'une solution politique soit trouvée. «Il faut faire preuve de beaucoup de fermeté et en même temps trouver les voies du dialogue et ne pas aller vers l'escalade», a déclaré le ministre français Laurent Fabius, à l'instar de plusieurs de ses collègues. (2)

La frilosité de l’Europe nous rappelle le sketch des sanctions infligées aux policiers qui se sont rendus coupables de sévices sur les mélanodermes. Coluche nous dit que ces policiers se voient infliger un avertissement. Au bout de 10 avertissements , ils ont un blâme et au bout de 10 blâmes , ils sont dégradés mais ils s’en foutent , ils sont flics de base » En clair ces sanctions ne pèseront pas lourds d’autant plus que la cause de l’Europe malgré tous les revanchards des anciennes républiques soviétiques (Pologne, Etats baltes) et même du duo d’enfer (Royaume Uni et France) qui ont été de tous les « mauvais coups » depuis près de 150 ans. On se souvient des attaques sournoises contre l’Empire Ottoman, qui fut en définitive dépecé après la grande guerre, nous nous souvenons des guerres contre le tsar de toutes les Russies, de la bataille de Crimée et de Sébastopol, en clair l’histoire se récrit sous nos yeux.


Sanctions économiques: Qui perd? Qui gagne?

Interrogé par Laure-Emmanuelle Husson Emmanuel Quidet, le président de la Chambre de commerce et d'industrie franco-russe, déclare que «la Russie n'hésitera pas à prendre des mesures de réciprocité contre l'Europe. Et ça pourrait faire mal. Les relations économiques sont très fortes entre la France et la Russie et elles se sont même considérablement approfondies ces dernières années. La France est ainsi devenue le 3ème investisseur étranger en Russie, derrière l'Allemagne et la Suède, alors qu'elle occupait la 9ème place en 2008. Au total, les investissements français en Russie représentent 12 milliards de dollars par an. Nous sommes présents dans beaucoup de secteurs différents. Par exemple, Renault, Peugeot, Danone et Total sont très actifs en Russie. Nous estimons qu'il y a environ 1.200 sociétés françaises implantées en Russie et 6.000 à 7.000 qui y exportent d'après les Douanes. (...je pense que c'est l'Europe qui aurait le plus à perdre de sanctions économiques car de nombreuses entreprises concernées par la Russie se retrouveraient alors en situation de surcapacité de production (...) Pour le moment, le mot d'ordre est «on continue à faire des affaires, on arrête rien». A ma connaissance, il n'y a pas de projets qui ont été reculés ou annulés. Les gens continuent de développer leurs affaires. S'ils sont inquiets, ils attendent d'en savoir plus sur la nature des mesures de rétorsion prises par l'Europe contre la Russie. Il n'y a rien d'autre à faire pour le moment» (3)

«Le rattachement à la Russie voté par les électeurs de Crimée était attendu. Poutine ira-t-il maintenant plus loin? Et si oui, avec quelles conséquences?» Avec Vladimir Poutine, on assiste à une repolitisation du monde, à l'instauration d'un système interétatique frictionnel», explique Thomas Gomart, directeur du développement stratégique de l'Institut français des relations internationales (Ifri). Il juge la situation liée à la crise ukrainienne «inflammable». Le plus simple pour Moscou est de couper d'abord, comme en 2006 et 2009, le gaz à l'Ukraine. La prédominance du nucléaire, qui réduit sa sensibilité au gaz, et le fait d'avoir conclu d'importants accords gaziers en matière de GNL avec le Qatar.» D'autres pays européens, comme la Pologne, dépendent des Russes, ce qui permettra à Moscou de tester la solidarité entre les uns et les autres.(3)

Que se passerait-il maintenant si la Russie, premier producteur de pétrole avec 10 millions de barils par jour, décidait de tout arrêter? Réponse de Patrick Artus, directeur de la recherche et des études à Natixis et administrateur de Total, qui a travaillé sur cette hypothèse: «Le prix du baril monterait à... 300 dollars, il y aurait en France 8 points de PIB en moins et 1,4 million de chômeurs en plus.» La Russie, membre de l'OMC depuis 2012, a une capacité de nuire qui dépasse le seul terrain de l'énergie. Et là, la France - fortement investie en Russie - devient vulnérable »(3).

Les patrons français du cac 40 – ceux qui font des affaires (Renault, Peugeot, voire Danone et même les chantiers navals ne sont surement pas d’accord. La Russie a d’ailleurs annoncé qu’en cas de non livraison des deux bateaux Mistral elle porterait l’affaire en justice en réclamant des intérêts . L’Allemagne a près de 6000 entreprises en Russie et les Allemands pour près de 80 % ne sont pas favorables à des sanctions contre la Russie.

Les Ukrainiens pensent naïvement que la liberté promise se double de nourriture et d'un niveau de vie. Cruelle erreur! Berthold Brecht disait «qu'un bulletin de vote ne se mangeait pas». L'Ukraine sera un gigantesque bazar pour 45 millions de consommateurs qui auront à se satisfaire de tous les surplus d'une Europe dont la consommation est en berne.

Paul Craig Robert ancien sous-secrétaire d'Etat américain au Trésor écrit: «Selon un rapport publié dans Kommersant-Ukraine, le ministère des Finances des comparses de Washington à Kiev qui prétendent être le nouveau gouvernement a préparé un plan d'austérité économique qui permettra de réduire drastiquement les pensions ukrainiennes de 160 $ à 80 $ de sorte que les banquiers occidentaux qui ont prêté de l'argent à l'Ukraine pourront être remboursés au détriment des pauvres Ukrainiens. L'Europe sera confrontée une fois de plus à une situation similaire à celle de la Grèce. Les pilleurs occidentaux sont déjà au travail, avant même que quelque chose d'approchant la stabilité et la légitimité ait été obtenu par le gouvernement fantoche mis au pouvoir par le coup d'Etat orchestré par Washington contre le gouvernement légitime élu démocratiquement. Les manifestants naïfs qui ont cru à la propagande selon laquelle l'adhésion à l'UE pourrait offrir une vie meilleure risquent de perdre près de la moitié de leur pension en avril. Mais ce n'est que le début. Les médias occidentaux corrompus ont présenté ces prêts comme une «aide». Cependant, les 11 milliards d'euros que l'UE offre à Kiev n'est pas une aide. Il s'agit d'un prêt. En outre, elle est apportée avec de nombreuses contraintes et servitudes, y compris l'acceptation par Kiev d'un plan d'austérité du FMI.» (4)

La Russie accusée d'expansionnisme

On oublie trop souvent que les Etats-Unis disposent de plusieurs centaines de bases hors Etats-Unis il n'empêche qu'on accuse la Russie d'expansionnisme. C'est le cas de Julien Theron qui fait l'inventaire à charge de tout ce que l'Occident n'accepte pas en termes de souveraineté des autres. Il écrit: «Après avoir déployé ses forces armées en Crimée, le Kremlin est en train d'imposer au monde un nouvel expansionnisme territorial, plus de vingt ans après la chute de l'Union soviétique, des Etats baltes aux îles Kouriles en passant par l'Afghanistan. Ce dimanche, se tient en Crimée un référendum sur le rattachement à la Russie considéré comme illégal par la majeure partie de la communauté internationale mais dont l'issue fait peu de doute: ce rattachement devrait se produire, sauf recul in extremis de Moscou. L'enjeu est de taille, car l'annexion de la Crimée induirait pour le XXIe siècle une géopolitique déstabilisatrice, où les États pourraient s'approprier à nouveau les territoires d'autres États souverains. (...) Pour Moscou, il s'agit alors autant de restaurer l'honneur de l'armée que d'éviter le détricotage des petites républiques caucasiennes de la Fédération.(..)» (5)


Le comble de l'ironie et de l'hypocrisie de ce journaliste est d'affirmer: «L'opposition au projet pourtant défensif de bouclier antimissile otanien en Europe centrale participe également à la restauration de ces éléments fondamentaux de la nouvelle géostratégie russe: maîtrise des territoires et influence stratégique. Les outils diplomatiques, économiques et militaires étant restaurés, la Russie passe à une autre étape. En 2007, le pôle Nord est le théâtre d'une surprenante tentative d'annexion. L'idée d'imposer sa souveraineté sur les sous-sols océaniques de cette région riche en hydrocarbures conduit la Russie à y déposer tout bonnement un drapeau. Geste cocasse s'il n'avait été dangereusement annonciateur.» (5)

On le voit, les notions de droit international quant au droit d'ingérence, la souveraineté et quant au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, l'exigence d'unité territoriale, c'est comme cela arrange l'Occident. Découper le Kosovo contre la Serbie pote de la Russie? C’est légal !. Démolir l'Irak pour le motif des ADM est toujours légal ! Intervenir en Libye, en Syrie, au Mali, aucun risque d'une quelconque condamnation ou sanction internationale.

Par la force des choses, l'UE qui aurait pu jouer le modérateur dans des enjeux qui la dépassent n'a plus aucune crédibilité politique en servant les intérêts des USA dans cette crise.. Elle vient de faire comprendre au monde qu'elle n'existait pas puisque enchaînée à l'Amérique...


En 1989, l'Occident avait commis une faute géopolitique, bafouer la dignité du peuple russe au-delà du régime communiste. La naïveté de Gorbatchev et la stupidité, arrogance et avidité des occidentaux, ont fait admettre que c'était la fin de l'histoire comme l'avait écrit à l'époque l'idéologue du pentagone Francs Fukuyama. L'hyperpuissance américaine prenait possession du monde et des peuples et tentait d'imposer l'american way of war Les Russes ont promis: Plus jamais ça! Et ils ont tenu leur parole. Aujourd'hui, la Russie est redevenue une grande puissance. L'Occident doit tourner la page sur une époque bel et bien révolue Le magister dixit n’a plus court . Le barycentre du Monde est asiatique. La Crimée a été russe de sa conquête par l'impératrice Catherine II, au XIXe siècle, à 1954, date de son rattachement à l'Ukraine au sein de l'URSS, sur une décision essentiellement symbolique de Nikita Khrouchtchev. C’est donc simplement un retour aux sources .

Conclusion :

Nous laissons Jean Geronimo résumer brièvement les enjeux de l'affaire ukrainienne: «A l'heure d'un risque d'embrasement de l'Est ukrainien, sonnant comme un cri de révolte et d'incompréhension face à une évolution politique en partie impulsée de l'étranger, la maladresse de l'ingérence occidentale risque de coûter très cher au peuple de Kiev. Après les fausses «révolutions colorées» d'inspiration libérale, frappant dans les années 2000 la périphérie post-soviétique et plaçant des dirigeants pro-américains à la tête des Etats géorgien, ukrainien et kirghize, la «révolte de Kiev» apparaît au final comme un sous-produit d'un modèle déjà expérimenté et prolongé, récemment, au Moyen-Orient, principalement en Libye et en Syrie. A la base de ce modèle «révolutionnaire», se trouve une stratégie de désinformation permettant la justification du processus politique conduisant au renversement d'un régime hostile (ici, celui de Ianoukovitch) et, surtout, à l'arrivée de dirigeants politiquement corrects (ici, pro-européens). (...) A terme, au-delà d'un redécoupage géopolitique de l'Ukraine selon l'ancien clivage Est/Ouest, catalysé par la volonté d'indépendance de la Crimée - dans le prolongement d'une jurisprudence initiée par l'indépendance du Kosovo en 2008 -, c'est bien l'extension de l'axe Otan-USA via l'UE, contre les intérêts russes, qui se joue. Au coeur de l'échiquier eurasien, cette extension de l'axe euro-atlantique sanctionnerait, de manière définitive, sa victoire de la Guerre froide».(6)


«Pour Brzezinski, dont l'analyse conclut Jean Géronimo, est considérée comme le vecteur de la politique extérieure américaine, le contrôle de l'Ukraine est donc une nécessité stratégique. Dans la mesure où l'Ukraine se trouve à un carrefour stratégique sur la base de la trajectoire des tubes énergétiques et des grands axes politiques du continent eurasien, elle devient pour moi, une sorte de «super pivot»: un noeud géostratégique. (...) Aujourd'hui, il s'agit bien d'un conflit entre deux visions du monde antagonistes, renforcé par le désir de Moscou d'apparaître comme une alternative au néo-libéralisme et de s'opposer à l'unilatéralisme américain, systématisé depuis la disparition du contrepoids géopolitique soviétique - c'est en ce sens, que la disparition de l'ex-URSS a été «la plus grande catastrophe géopolitique du 20° siècle». (6)

A n'en point douter, le pillage de l'Ukraine n'apportera pas le bonheur aux besogneux qui vont suer sang et eau pour des lendemains qu'on leur avait promis rayonnants. C'est un peu le destin de la Grèce qui se profile. La dette énorme de l'Ukraine sera de plus en plus lourde et les fourches caudines des créanciers achèveront de dévitaliser l'Ukraine. D'une certaine façon et sans que cela ne soit le nirvana, le sort de la Crimée qui retrouve son âme sera de loin moins tragique que celui de l'Ukraine. Ainsi va le monde.



1. http://www.lexpress.fr/actualite/monde/ europe/vladimir-poutine-la-crimee-est-une-partie-integrante-de-la-russie_1501016.html

2. http://www.challenges.fr/economie/20140317.CHA1632/l-europe-et-les-etats-unis-prennent-des-sanctions-contre-la-russie.html

3. http://www.challenges.fr/economie/20140317.CHA1628/sanctions-economiques-l-europe-aurait-plus-a-perdre-que-la-russie.html

4. http://www.mondialisation.ca/le-pillage-de-lukraine-par-les-usa-et-lue-a-commence/5373514

5.J.Théron http://rue89.nouvelobs.com/ 2014/03/16/referendum-crimee-back-in-the-ussr-250722

6. Jean Geronimo http://www.mondialisation.ca/la-revolution-dukraine-et-apres-les-enjeux-du-referendum/5373675

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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20 mars 2014 4 20 /03 /mars /2014 16:32

« Tolstoï conte qu'étant officier et voyant, lors d'une marche, un de ses collègues frapper un homme qui s'écartait du rang, il lui a dit : « N'êtes-vous pas honteux de traiter ainsi un de vos semblables ? Vous n'avez donc pas lu l'Évangile ? ». À quoi l'autre répondit : « Vous n'avez donc pas lu les règlements militaires ? ».

On dit que l’intellectuel n’a pas les pieds sur terre il « plane », il n’est pas en phase aves la réalité du monde. Ce que lui reprochera Antonio Gramsci qui parle de praxis c'est-à-dire son refus de se jeter dans la mêlée de la réalité du terrain. A l’autre bout du curseur dans son ouvrage culte « La Trahison des clercs » Julien Benda reproche aux intellectuels de perdre leurs âmes en s’acoquinant avec le pouvoir. À une époque où de nombreux intellectuels et artistes se tournaient vers la politique au nom du réalisme, Julien Benda leur reproche de se détourner des valeurs cléricales, c'est-à-dire la recherche du beau, du vrai, du juste, et qui sont pour lui statiques, désintéressées et rationnelles.

Nous allons dans ce qui suit montrer que ce que l’on appelle généralement l’élite demande à être explicitée tant il est difficile de la cerner. Nous donnerons ensuite quelques aperçus de ce que c’est - de ce que devrait être l’intellectuel- avec un inventaire des intellectuels en Algérie , de leur mal être mais aussi de leur perception des affaires de la cité au vue de la convulsion du champ social

Qu’est ce qu’une élite ?

Si l’on croit l’encyclopédie Wikipédia : « L'élite regroupe la population qui a une place en haut d'une hiérarchie. À l'origine, le statut d'élite n'est pas accordé par la détention du pouvoir, mais par l'autorité morale, . Aujourd'hui il est plus courant d'évoquer les élites. Toutes les civilisations de la vieille Europe se sont efforcées de proposer des modèles humains dans la perspective de se grandir. Dans cette première acception, l'élite est liée à l'idée d'excellence et par extension « l'honnête homme ». (…) Dans l'Antiquité romaine, être citoyen est un idéal Celui qui est citoyen a des obligations envers lui-même et envers les autres. Le xviie siècle propose le modèle de l'honnête homme. L'honnête homme se caractérise par une élégance extérieure et intérieure : distingué sans être précieux, cultivé sans être pédant, galant sans être fade, mesuré, discret, brave sans forfanterie. Noble du cœur, il a l'élégance de ne pas exhiber son moi, la pudeur de ne pas étaler son orgueil ».(1)

L’élite de nos jours les techniques d’élévation sociale

« L’élite au singulier a disparu, on parle de plus en plus des élites, terme qui a perdu de son intensité : « À partir de la fin des xixe et xxe siècles, en Europe [ ndR] on paraît observer une crise de l'élite, avec la disparition d'un modèle humain au sens de la plénitude que celui-ci peut apporter. (..) Aujourd'hui, l'élite finit par désigner l'occupation d'une position enviable. On distingue les Élites entrepreneuriales qui sont des décideurs dans l'entreprise Les élites administratives qui occupent la haute fonction administrative issus des grands corps de l'État très homogènes (grandes écoles) [ndR] Bourdieu parlera de « noblesse d'État ». » (1 )

On entend généralement par le terme d'élites intellectuelles les auteurs d'ouvrages de recherches et de réflexions , les enseignants des cycles supérieurs Les Élites « traditionnelles » Concerne ici les familles de l'ancienne noblesse où certaines valeurs, traditions et art de vivre servent de "codes". La notion d'élite implique nécessairement l'idée d'une supériorité : en prestige, richesse, pouvoir, au bénéfice de minorités, alors que la démocratie paraît supposer l'égalité générale des statuts ».(1)

Est-ce pour autant l’aspect moral est conservé ? Non : « L'appétit pour le pouvoir ne disparaît pas avec la fiction égalitaire. Les sociétés développées ont conçu des techniques artificielles d'élévation sociale. Ces techniques sont de deux types : matérielles, fondées sur les biens possédés; et intellectuelles, fondées sur l'instruction. Les techniques matérielles : dans toutes les sociétés développées, la richesse est toujours objet d'envie mais pas d'admiration. Dans la morale classique, la poursuite de l'or est toujours dénoncée avec vigueur. Les techniques intellectuelles sont celles basées sur le savoir et l'instruction. L'intellectuel moderne ne fait plus recette. La première tentation de l'intellectualisme, c'est l'abstraction. Elle n'est pas en soi négative, mais s'éloigne parfois trop de la réalité vécue. L'idéal défini par Condorcet selon lequel l'acquisition du savoir est le moyen principal de hisser l'humanité, et où l'école est dans cette perspective le moyen privilégié d'ascension sociale, a été perverti »(1).

Quel est le rôle de l’intellectuel ?

Qu’en est il justement de l’intellectuel censée représenter cette élite, cette aristocratie du neurone ? . En tant qu'intellectuel, Antonio Gramsci a étudié les problèmes de la culture et de l'autorité. Nous lisons à son propos sur l’Encyclopédie Wikipédia « Il oppose à la dialectique matérialiste une « philosophie de la praxis ».s'est intéressé de près au rôle des intellectuels dans la société. Il disait notamment que tous les Hommes sont des intellectuels, mais que tous n'ont pas la fonction sociale d'intellectuels Il avançait l'idée que les intellectuels modernes ne se contentaient pas de produire du discours, mais étaient impliqués dans l'organisation des pratiques sociales. Il établissait de plus une distinction entre une « intelligentsia traditionnelle » qui se pense (à tort) comme une classe distincte de la société, et les groupes d'intellectuels que chaque classe génère « organiquement ». Ces intellectuels organiques ne décrivent pas simplement la vie sociale en fonction de règles scientifiques, mais expriment plutôt les expériences et les sentiments que les masses ne pourraient pas exprimer par elles-mêmes. (…)Pour Gramsci, l'avènement du socialisme ne passe prioritairement ni par le putsch, ni par l'affrontement direct, mais par ce combat culturel contre les intellectuels de la classe dirigeante. (2)

Les intellectuels ont-ils vocation à trahir leurs idéaux ?

Dans La trahison des clercs (1927), Julien Benda avait dénoncé l'abandon des valeurs universelles humanistes, héritées des Grecs, au profit de l'engagement partial et contingent : "Les hommes dont la fonction est de défendre les valeurs éternelles et désintéressées, comme la justice et la raison, que j'appelle les clercs, ont trahi cette fonction au profit d'intérêts pratiques." (…) Comme le dit Benda, ils ont introduit à l'intérieur de la vision des événements, comme un ver qui le ronge, leurs propres passions et préjugés : "Ils sont des hommes politiques qui se servent de l'histoire pour fortifier une cause dont ils veulent le triomphe." Et à partir de là, ils adoptent une posture politique leur permettant d'asseoir leur image d'opposant ou de faire fructifier leurs notoriété et intérêts personnels. Ne les intéressent plus que la passion politique, le désir de vaincre dans la controverse, avec toutes les armes disponibles, fussent-elles les plus viles : le mensonge, la diffamation et la diabolisation de l'interlocuteur devenu un adversaire à abattre, à déconsidérer » (3).

Devons nous alors être des intellectuels organiques au sens de Gramsci pour avoir une visibilité sociale et se faire son propre chemin dans la vie ? Ne risque – t-on pas à force de compromis perdre notre âme tomber dans la compromission avec le pouvoir ?

Qu’en est il du rôle des intellectuels dans une Algérie en plein danger ?

En Algérie les techniques matérielles ont pris le pas sur les techniques intellectuelles et il et il est mal venu de parler d’élites politiques ou dirigeantes s’agissant de personnes qui pour la plupart ont jailli du néant, n’ont aucune autre légitimité si ce n’est celle d’une ascension sociale météoritique basée souvent sur des malversations connues de tout le monde

Il est aussi curieux de constater que sur les grands problèmes qui interpellent le pays, les intellectuels ou réputés tels font preuve d’un silence assourdissant. Au-delà de ceux qui de l’étranger font des fetwas contre le pouvoir embusqués derrière leur confort et qui font dans le « Ya qu’à « Il y a ceux qui mesurent d’où vient le vent, un adage du terroir dit que « l’Algérien est toujours de celui qui est debout » « m’aa el ouakef » Doit il s’indigner sur commande et signer des pétitions et le reste du temps à l’instar de l’autruche mettre sa tête dans le sable ? Justement deux problèmes majeurs vont devenir de plus en plus récurrent

Comment, avant toute chose, cimenter la nation algérienne. Cela devrait être de mon point de vue la priorité des priorités qui fera que nous pourrons ou non résister à l'émiettement qui nous guette. D’abord le vivre ensemble. On apprend comme un fait divers que Ghardaïa est une fois de plus à feu et à sens Des dizaines de magasins incendiés et plusieurs blessés dont deux gravement atteints suite à une violence brutale avec dit-on l’absence de réaction des autorités locales devant la gravité de la situation. des jeunes se sont attaqués à des fidèles en pleine prière du vendredi dans la mosquée. Au risque de me répéter l’Etat doit être impartial , présent et juste ; La morale à l’ancienne a de moins en moins cours. Il s’avère indispensable de changer de fusil d’épaule et de traiter les problèmes avec les outils de la modernité

Il est important de savoir que le monde sera de plus en plus dangereux et l'agressivité des nations sera proportionnelle à leur dépendance aux matières premières au premier rang desquelles il y a le pétrole. Les dangers que court le pays sont réels et que seul un consensus de tous permettra de faire émerger de nouvelles légitimités qui auront le difficile privilège d'amener l'Algérie à bon port, c'est-à-dire à lui donner une visibilité sur le plan international et surtout une «horma» qui ne peut être indexée sur les rodomontades des professionnels de politique mais sur une réelle puissance fruit du travail de la sueur, en un mot de l'intelligence, dans ce XXIe siècle de tous les dangers. Souvenons-nous ,toutes les anciennes frontières vont être redessinées. L'Empire et ses vassaux ne laisseront pas les peuples tranquilles.(4)

Le deuxième chantier est celui de l’avenir du pays . A l'extérieur, l'Algérie ne pèse pas lourd, c'est tout au plus un marché de 60 milliards de dollars dont il faut s'arracher les faveurs d'une façon ou d'une autre. Les choix économiques inadaptés ont débouché sur l'économie de rente, la dépendance alimentaire, la vulnérabilité, la volatilité et la dépendance. L'Algérie vit, présentement et pour les quelques prochaines années, un rendez-vous avec son destin. Dit autrement, nous sommes peut-être un pays «conjoncturellement riche» mais misérablement sous-développé. (4)

Dans une contribution en forme d’inventaire Belkacem Ahcene-Djaballah décrit les catégories d’intellectuels et leurs destins: « On entend (et on lit) souvent dire que le pays n'a pas d'élite, n'a pas d'intellectuels, n'a pas d'intelligentsia, n'a pas de penseurs, n'a pas... n'a pas... (…) Les attaques viennent, la plupart du temps, sinon toujours, de nouveaux politiciens, pour bien d'entre-eux déçus de ne pas avoir été rejoints par des «spins doctors» qui leur auraient permis de présenter des programmes politiques bien plus élaborés et des angles d'attaque efficaces. Elles viennent, aussi, de décideurs qui, n'étant pas arrivés à exploiter totalement, comme ils l'entendent, les matières grises de ceux «qui écrivent, qui créent et qui crient», remâchent leurs rancunes par la critique, l'invective et, parfois, l'insulte directe ou déguisée. Elles viennent de pseudo-intellectuels qui, parce qu'ils arrivent à plastronner tous les vendredis, dans les cafés et salons de quartier, se posent en maîtres de la pensée, mélangeant religion et politique, passion et raison, idées et idéologies… » (5)

Ce catalogue à la Prévert est réaliste. Outre le fait qu’il y a une confusion ente les termes élites intellectuels ne donne pas la solution sur ce qu’est la fonction sociale de l’intellectuel

Rôle des intellectuels africains dans la démocratie en Afrique ?

Le constat de compromission des intellectuels qui –se vendent au plus offrant- est bien décrit par Alexis Dieth qui s’interroge sur le rôle des intellectuels africains: « Une réponse précise à cette question est d’autant plus urgente que la démocratie libère la parole, appelle le débat d’idées, requiert la construction de projets de société et que les nouveaux régimes démocratiques sollicitent de plus en plus les intellectuels, pour penser la démocratie afin d’en déployer toute l’efficience dans le sens de l’émancipation des peuples. Bien souvent, par le passé, beaucoup d’intellectuels africains s’étaient, par affinité ethnique et pour des raisons pécuniaires, mis au service des dictatures. Nombre d’entre eux se sont fait conseillers des tyrans et ont été les intellectuels organiques des régimes despotiques du continent. (…) Historiens, avocats, philosophes et hommes de lettres cédèrent à l’ivresse du pouvoir et à la séduction de l’argent qui les transforma en prédateurs et en oppresseurs des peuples. Le peuple africain est donc désabusé parce que les intellectuels africains se sont discrédités. Ils ont trahi les idéaux qu’ils étaient censés servir et sont tombés dans l’hétéronomie ». (6)

Dans une livraison assez ancienne du Monde Diplomatique nous lisons contributions de plusieurs intellectuels .. Pour Paul Nizan, les intellectuels sont muets : « Que font les penseurs de métier au milieu de ces ébranlements ? Ils gardent encore leur silence. Ils n’avertissent pas. Ils ne dénoncent pas. Ils ne sont pas transformés. Ils ne sont pas retournés. L’écart entre leur pensée et l’univers en proie aux catastrophes grandit chaque semaine, chaque jour, et ils ne sont pas alertés. Et ils n’alertent pas ». (7)

Dans le même ordre nous citons l’inoxydable Edward Saïd pour qui : « La politique est partout On ne peut lui échapper en se réfugiant dans le royaume de l’art pour l’art et de la pensée pure, pas plus d’ailleurs que dans celui de l’objectivité désintéressée ou de la théorie transcendantale. Les intellectuels sont de leur temps, dans le troupeau des hommes menés par la politique de représentation de masse qu’incarne l’industrie de l’information ou des médias ; L’intellectuel doit, pour y parvenir, fournir ce que Wright Mills appelle des « démasquages » ou encore des versions de rechange, à travers lesquelles il s’efforcera, au mieux de ses capacités, de dire la vérité. (...) L’intellectuel, au sens où je l’entends, n’est ni un pacificateur ni un bâtisseur de consensus, mais quelqu’un qui engage et qui risque tout son être sur la base d’un sens constamment critique, quelqu’un qui refuse quel qu’en soit le prix les formules faciles, les idées toutes faites, les confirmations complaisantes des propos et des actions des gens de pouvoir et autres esprits conventionnels. Non pas seulement qui, passivement, les refuse, mais qui, activement, s’engage à le dire en public. (...) Le choix majeur auquel l’intellectuel est confronté est le suivant : soit s’allier à la stabilité des vainqueurs et des dominateurs, soit – et c’est le chemin le plus difficile – considérer cette stabilité comme alarmante, une situation qui menace les faibles et les perdants de totale extinction, et prendre en compte l’expérience de leur subordination ainsi que le souvenir des voix et personnes oubliées.(7)(8) Tout est dit

1.L’élite : Encyclopédie Wikipédia

2.Antonio Gramsci : Encyclopédie Wikipédia

3. Daniel Clervaux La trahison des clercs - les intellectuels se sont toujours trompés de camp 25 . Achkel.info juillet 2010

4. http://www.lexpressiondz.com/chroniques/analyses_du_professeur_chitour/190006-l-urgence-d-une-transition-energetique.html

5.Belkacem Ahcene-Djaballah http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5195357

6.http://www.afrik.com/role-des-intellectuels-africains-dans-la-democratie-en-afrique

7.http://www.monde-diplomatique.fr/2006/05/A/13489

8.Edward W. Said, Des intellectuels et du pouvoir, Seuil, Paris, 1996

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13 mars 2014 4 13 /03 /mars /2014 22:58

«Plutôt que d´interroger, nous nous interrogeons sur l´avenir de l´homme en général et de l´Occident en particulier puisque c´est lui qui dominera le monde matériel. Cet Occident est malade de son intelligence. Il a beau être savant, il n´arrive pas à saisir une vérité essentielle tant il est vrai qu´il est assoiffé de conquête et de pouvoir, aveuglé par l´illusion de sa puissance, prônant l´argent pour Dieu.... (...)»

L´Emir Abd El Kader dans Kitâb al mawâkif,

Enfin, les religieuses de Ma'aloula sont libres! Nous ne pouvons qu'être soulagés que ces religieuses aient recouvré la liberté saines et sauves après avoir été détenues par les hommes d'al Nosra, les combattants contre le régime syrien. Cependant, on ne peut qu'être scandalisé devant ce deux poids, deux mesures» s'agissant de personnes défendues par l'Occident qui faut-il le rappeler est à la base du malheur des Syriens et Syriennes morts par milliers dans un conflit qui les dépasse.

Cette sollicitude suspecte à l'endroit des chrétiens d'Orient ne doit pas nous faire oublier que ces religieuses partagées entre deux mondes, celui de leur culture et ethnie et celui de leur religion ont toujours servi de variables d'ajustement dès le XIXe siècle. S'il faut se féliciter de leur libération au bout de quelques cent jours, du fait que le gouvernement syrien ait accepté de libérer 150 personnes en échange d'elles (moins d'une dizaine), il ne faut pas croire à une quelconque miséricorde exceptionnelle.


Le précédent «sauvetage» des chrétiens d'Orient


L'apogée récente de la crise syrienne, au tournant de l'été, a mis en lumière le mépris nourri par le camp occidental à l'égard du nationalisme arabe: bien peu d'éditorialistes ont rappelé le rôle historique des Assad dans le maintien du caractère pluriconfessionnel de la nation syrienne au sein de la poudrière proche-orientale. Alors que l'atlantisme insensé de l'administration française a manqué de provoquer un embrasement, évité de justesse grâce à la diplomatie russe, il est troublant de constater que l'une des figures historiques du nationalisme algérien était liée de par son histoire à la France et à Damas. L'émir AbdelKader, par ailleurs théologien soufiste reconnu, avait oeuvré en faveur du dialogue islamo-chrétien dans l'actuelle capitale syrienne. (1)

Dans l'histoire, nous nous souvenons que l'Emir Abdelkader avait sauvé d'une mort certaine des milliers de chrétiens lors des émeutes de Damas, où justement les puissances
maléfiques de l'époque - la perfide Albion et le coq gaulois- n'arrêtent pas d'attaquer «l'Empire ottoman «l'homme malade de l'Europe», on remarquera qu'à l'époque, la Turquie faisait partie de l'Europe, et au XXIe siècle pas... Résultat des courses: la France est partie défendre les chrétiens au nom d'une certaine promesse qu'aurait faite saint Louis à l'évêque Maroun de le prendre sous sa protection.

D'une façon lancinante, la France a tout fait pour créer des dissensions entre les Arabes chrétiens et musulmans attisant ainsi les haines religieuses et provoquant de ce fait la haine des autres sujets de l'Empire ottoman au Bilad Echam. L'Emir Abdelkader installé à Damas lors de son exil sortit de chez lui, rapporte D'estailleur Chanteraine, à la tête de sa garde, il sillonna les rues de Damas et ramena plusieurs milliers de Chrétiens chez lui, les sécurisa, les hébergea, les nourrit, les soigna pendant près d'un mois jusqu'à ce que les évènements disparurent. (2)

Est-ce que l'Emir Abdelkader avait en tête, comme les politiciens de l'époque, un quelconque marchandage dont il recueillerait les dividendes en se faisant au prix fort la détresse des Arabes chrétiens? Non, mille fois non! On connait le soldat, l'homme valeureux qui combattit la sinistre armée d'Afrique pendant près de quinze ans. On connait l'homme fidèle en parole et en amitié et on prend conscience d'une autre dimension de la personnalité de l'émir: la dimension spirituelle pour ce disciple d'Ibn Arabi à tel point qu'il a demandé à être enterré à côté de lui. En effet, bien avant cette singularité - le sauvetage des chrétiens du Liban- qui a paru exceptionnelle pour les puissances de l'époque et même la papauté qui tous ont envoyé des décorations à l'Emir.

Souvenons-nous! Nous sommes en pleine guerre à outrance de l'Emir contre les hordes de Bugeaud, un religieux français prend contact avec l'Emir et lui demande de délivrer un militaire de sa connaissance prisonnier de l'Emir.

Nous lisons dans une contribution de monseigneur Tessier et monsieur Boutaleb, dans une conférence conjointe à Lyon: «Mgr Dupuch qui écrit d'abord à l'Emir ceci: «Si je pouvais monter à cheval sur le champ, je ne craindrais ni l'épaisseur des ténèbres, ni les mugissements de la tempête, je partirais, j'irais me présenter à la porte de ta tente, et je te dirais d'une voix à laquelle, si on ne me trompe point sur ton compte, tu ne saurais résister: donne-moi, rends moi celui de mes frères qui vient de tomber dans tes mains guerrières... mais je ne peux partir moi-même. Cependant, laisse-moi dépêcher vers toi l'un de mes serviteurs et suppléer par cette lettre, écrite à la hâte, à la parole que le ciel eut bénie, car je t'implore du fond du coeur. «Bienheureux les miséricordieux, car un jour il leur sera fait miséricorde à eux-mêmes.»

La réponse de l'Emir fut à la fois simple et profonde, les auteurs écrivent: «Abdelkader répond à l'évêque la lettre suivante,: «J'ai reçu ta lettre. Elle ne m'a pas surpris d'après ce que j'ai entendu de ton caractère sacré... Pourtant, permets-moi de te faire remarquer qu'au double titre que tu prends de serviteur de Dieu et d'ami des hommes, tes frères, tu aurais du me demander non la liberté d'un seul, mais bien plutôt celle de tous les chrétiens qui ont été faits prisonniers depuis la reprise des hostilités. Bien plus, est-ce que tu ne serais pas deux fois digne de la mission dont tu me parles si, ne te contentant pas de procurer un pareil bienfait à deux ou trois cent, chrétiens, tu tentais encore d'en étendre la faveur à un nombre correspondant de musulmans qui languissent dans vos prisons. Il est écrit: «Faites aux autres ce que vous voudriez que l'on fasse à vous-mêmes!» Remarquons en passant que l'Emir utilise là, comme argument, une phrase du Nouveau Testament.» (3)



Les manoeuvres séculaires de l'Occident pour régner en divisant

Les puissances de l'époque ont réussi à l'empire Ottoman croulant sous la dette et ne contrôlant plus la périphérie, l'obligation de nommer un moutassarif chrétien qui aurait à gérer les affaires des chrétiens. La partition de Bilad acham devait donner naissance graduellement à un territoire Nous verrons justement que le Liban est une création des nations européennes, notamment après les tragiques et scandaleux accords de Sykes Picot qui ont dépecé l'Empire ottoman avant même la fin de la Première Guerre mondiale.

Une interview de la mère Marie-Agnès de la Croix du mercredi 18 décembre 2013 permet d'éclairer les lecteurs sur les manipulations de la presse occidentale dite «libre». «Nous nous sommes aperçus avec surprise, écrit l'auteur qui a interviewé la religieuse, en préparant cet entretien que le témoignage de cette personnalité était entièrement ignoré par les journalistes encartés. Plus généralement, c'est le cas de toutes les personnalités chrétiennes de Syrie qui dénoncent massivement et souvent avec des mots très durs, les mensonges répétés et quotidiens des médias de la zone Otan. Nous avons même pu nous rendre compte que des consignes étaient données par les directions des grands médias pour empêcher que soit diffusée sa version des faits. En plus de donner une version très différente de ce qui se passe sur place, la mère Marie-Agnès dénonce un traitement médiatique unilatéral, partial, et tendancieux des événements de Syrie. La mère Marie-Agnès revient par ailleurs dans cet entretien sur la mort du journaliste Gilles Jacquier en janvier 2012, mort dans laquelle certains médias français (le magazine envoyé spécial par exemple) ont suggéré que sa responsabilité était engagée». (4)


La réalité des événements et la collusion des médias mainstream

«A une question sur la situation en Syrie Mère Marie-Agnès déclare: «Il faut vous dire que le régime au pouvoir en Syrie (le parti Baas, Ndlr) est un régime de gauche qui est axé sur le socialisme et entaché de stalinisme; c'est un parti unique qui n'a pas beaucoup été conscient des libertés personnelles, civiles, et qui ne les a pas appliquées (...) C'est pourquoi lorsque les événements ont eu lieu, nous étions plutôt sympathisants des demandes de la population à plus de libertés et de démocratie. (...) J'ai donc d'abord refusé... mais il y a eu une petite insistance et j'ai décidé de faire mon enquête. Je suis quelqu'un de plutôt méthodique, je n'aime pas parler sans connaissance de cause, j'ai aussi fait mon enquête sur Internet, et puis j'ai accouché d'une étude de 12 pages que j'ai envoyé à cette ONG et qui s'intitule «Au crible des informations tendancieuses la situation en Syrie.» vers le mois d'avril 2011. Alors là, ça a été bien reçu par cette ONG, et ça été placé sur son réseau, mais il y a eu des critiques provenant du clergé qui récusaient mon point de vue et j'ai bien senti qu'il y avait des tabous, c'est-à-dire, d'ores et déjà, on avait canonisé les printemps arabes.»(4)


« Il faut être honnête. Je pense que c'est une réalité que la presse mainstream (les médias commerciaux de masse, Ndlr) n'est pas aussi libre qu'elle le prétend(...) Je sais que je vais choquer beaucoup de personnes qui se sentent sincèrement fières d'appartenir au «monde libre et démocratique», mais ce monde libre et démocratique est aujourd'hui en décadence. Moi, je considère qu'il est en décadence et donc la manière dont les événements sont couverts en Syrie n'a rien à voir avec le professionnalisme journalistique qui a été préconisé par la charte de Munich. En faisant mon enquête auprès du Croissant- Rouge, j'avais obtenu les vraies listes des morts où l'on décelait que le tiers était des forces de l'ordre alors que cela n'était pas présent dans les médias. (...) ces journalistes qui sont venus en Syrie n'ont pas fait leur travail en se conformant aux principes de la charte de Munich» (...) (4).


La tragédie des chrétiens d'Orient

Qu'en est-il en définitive, de ces chrétiens d'Orient qui intéressent l'Occident? Comment est perçue cette tentative récurrente d'ingérence caractérisée depuis près de deux siècles dans les affaires arabes? (5)

A leur façon, deux Arabes chrétiens répondent: Hayat al Huwik Atia, journaliste libanaise de confession maronite interpellant le pape lors de son voyage en Israël: «L'Eglise d'Orient refuse d'être entraînée dans le processus de judaïsation de l'Occident chrétien. (...) Nous, l'Orient arabe chrétien, nous ne voulons pas de ce néochristianisme judéo-chrétien et nous refusons que l'Occident chrétien utilise l'influence spirituelle occidentale des églises, catholiques et protestantes pour implanter en Orient et particulièrement dans le Monde arabo-chrétien l'idée ou l'influence de judaïsation. Votre Sainteté le pape, sachez que je suis une chrétienne arabe! (...) Par conséquent, cela ne m'empêche pas de vous rappeler ma fierté d'appartenir à cette terre arabe. Cette terre est le berceau de toutes les Religions et de toutes les Révélations monothéistes. (...) La deuxième raison, est que c'est l'Occident qui est le générateur historiquement du racisme et du sionisme avec tous les résultats connus et, notamment ceux que cet Occident exerce depuis des décades contre le Monde arabe pour saper cette cohésion sociale et religieuse dans le Monde arabe. (..) En conséquence, Votre Sainteté, sachez que nous - Arabes chrétiens - nous ne sommes une minorité en aucune façon, tout simplement parce que nous étions des Arabes chrétiens avant l'Islam, et que nous sommes toujours des Arabes chrétiens après l'Islam. La seule protection que nous cherchons est comment nous protéger du plan occidental qui vise à nous déraciner de nos terres et à nous envoyer mendier notre pain et notre dignité sur les trottoirs de l'Occident.» (...) (6)

Pour sa part, le docteur Rafiq Khoury, prêtre palestinien du Patriarcat latin de Jérusalem, écrit: «(...) les Chrétiens font partie de l'identité de la terre et la terre fait partie de leur identité, avec leurs concitoyens musulmans. (...) L'arabité et la palestinité des chrétiens de Palestine sont des faits acquis, que nous recevons avec le lait de notre mère, comme on dit en arabe. Les relations islamo-chrétiennes en Orient, en général, et en Palestine en particulier, s'inscrivent dans une longue histoire, qui a à son actif treize siècles de communauté de vie, où nous avons partagé «le pain et le sel», comme on dit en arabe aussi.(…) » (7)

Tout est dit, le sort des Chrétiens n'intéresse l'Occident que dans la mesure où il peut faire aboutir ses autres projets, à savoir la mainmise sur les ressources énergétiques, mais aussi l'instauration d'une paix occidentale qui ne se fera pas sans dégât durable. Les ingérences continuelles contribuent à créer cette tension permanente qui n'existait pas avant. Nous devons témoigner et dire notre rejet de la violence d'où qu'elle vienne. Qu'on laisse ces sociétés ´´arabes harassées par tant de malheur retrouver dans les religions du Livre le secours spirituel qui manque de plus en plus à ces sociétés qui risquent une sécularisation au nom du «Money-théisme» seul Dieu qui s'impose par ces temps incertains. Ces vers de l'émir Abdelkader démontrent toute la dimension oecuménique de son message: «Mon coeur est devenu apte à revêtir toutes les formes. Il est pâturage pour les gazelles et couvent pour les moines. Temple pour les idoles et Kaâba pour le pèlerin. Il est les tables de la Torah et le livre du Coran.Je professe la religion de l'amour, quel que soit le lieu. Vers lequel se dirige ses caravanes. Et l'amour est ma loi et ma foi». Amen



1. http://www.egaliteetreconciliation.fr/L-emir-Abd-el-Kader-artisan-de-la-reconciliation-a-Damas-21049.html


2. Phillipe D'estailleur Chanteraine:L'Émir Magnanime Abd-el-Kader le croyant, 1959


3. http://lyon.catholique.fr/IMG/Teissier_Boutaleb_L_Emir_et_les_chretiens_071204.rtf


4. http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/une-interview-de-la-mere-agnes-145196


5. http://www.mondialisation.ca/la-trag-die-des-chr-tiens-d-orient-la-responsabilit-de-l-occident/21884


6. Hayat al Huwik Atia: Lettre ouverte http://liberation-opprimes.net/ 24 mai 2009


7.Rafiq Khoury: Palestine http://www.gric.asso.fr/spip.php? ar... 30.04.2009

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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10 mars 2014 1 10 /03 /mars /2014 14:33

«Il n'y a rien de plus grand aux yeux de Dieu qu'un homme qui a appris une science et qui l'a enseignée au peuple.» «La connaissance qui n'est pas utilisée est comme un trésor dont rien n'est dépensé. Ses propriétaires ont labouré en le rassemblant, mais ils n'en ont jamais bénéficié.» «Si Dieu te dirige vers un seul homme [qui est instruit], c'est mieux pour toi que le monde entier et ce qu'il contient.»

Ibn Khayr dans son Farasah

Un mal qui répand la terreur, l'allogène basané et de surcroit arabe, puisqu'il faut l'appeler par son nom, est en train de polluer la blanche et doulce France. Nous allons dans ce qui suit, expliquer en quelques lignes que les Arabes sont un peuple comme les autres, ni meilleur ni pire et qui a transmis par l'intermédiaire de la langue une belle période civilisationnelle. Dans un second temps, nous allons rapporter le réquisitoire à son encontre et montrer qu'il ne repose pas sur des fondations étayées, mais fait l'objet de croisades dont les médias ne sont pas en reste, eux qui donnent de l'épaisseur à tous les pyromanes et intellectuels autoproclamés qui dictent aux citoyens lambdas ce qu'ils doivent penser, ce qu'ils doivent

oublier.

Qui étaient les Arabes?

On dit que les Arabes sont un ancien peuple sémitique dont le barycentre fut l'actuelle Arabie Saoudite. Sans vouloir faire l'apologie de ce peuple du désert, qu'il nous suffise de rapporter pour la période anté-islamique l'une des facettes de ce peuple fier. Beaucoup d'entre nous dans leur jeunesse ont vibré aux rapsodies et autres mou'allaquate où les joutes oratoires se faisaient à Oukadh. On rapporte que Samaouel, auteur juif anté-islamique auteur de la célèbre «lamiatou Samaouel» n'a pas voulu dévoiler un secret que lui avait confié Antar Ibn Cheddad mettant en péril de ce fait, la vie de son fils.. Depuis l'expression «aoufa min Samaouel» «Plus fidèle - au serment- que Samaouel- a traversé les siècles.

Quand on se rend compte de toute l'étendue des domaines que les Arabes embrassèrent dans leurs expérimentations scientifiques, leurs pensées et leurs écrits, on voit que sans les Arabes, la science et la philosophie européennes ne se seraient pas développées à l'époque comme elles l'ont fait. Les Arabes ne se contentèrent pas de transmettre simplement la pensée grecque. Ils en furent les authentiques continuateurs. La conquête arabe apportait les éléments d'un nouvel enthousiasme pour le savoir, une langue que se forge et qui s'impose comme un instrument de communication internationale; un gouvernement fortement centralisé; une religion qui exalte la connaissance. Le Coran énonce que l'encre des savants est plus précieuse que le sang des martyrs. Le monde occidental manifesta une réserve, voire une hostilité envers ces savoirs étrangers. Avant, à son tour, de se les approprier et de les enrichir.

S'agissant de la langue, l'illustre savant Jacques Berque explique dans Les Arabes et nous que la fonction de la langue pour les Arabes est différente, supérieure à celle qu'elle remplit pour les Occidentaux. Il donne un exemple: ainsi, en arabe, les mots se rapportant à l'écrit dérivent tous de la racine k.t.b.: Maktûb, maktab, maktaba, kâtib, kitâb. En français, ces mêmes mots sont: écrit, bureau, bibliothèque, secrétaire, livre. Les mots français sont tous les cinq arbitraires, mais les mots arabes sont, eux, «soudés par une transparente logique à une racine qui seule est arbitraire». «Alors que les langues européennes solidifient le mot, le figent, en quelque sorte, dans un rapport précis avec la chose, le mot arabe reste cramponné à ses origines. Il tire substance de ses quartiers de noblesse.» (1)


Que sont devenus ces héritiers de Dar El Hikma, des poèmes el Mou'allaquat de Dubyani, de Antar et de tant d'autres? Les pays arabes actuels sont tombés bien bas. Ils ont du mal à enrayer l'illettrisme. «L'analphabétisme touche près de 40% des personnes âgées de plus de 15 ans» dans ces pays, soit près de 60 millions d'adultes, selon un rapport de l'Unesco, publié le 7 janvier 2009. Faut-il pour autant insulter les peuples et ne pas s'en prendre à juste titre à leurs dirigeants? Mais ceci est une autre histoire.



Voyage au cœur de l'intolérance

Nous allons voir dans ce qui suit que l'intolérance envers les Arabes n'est pas une spécificité de tel ou tel pays. A des degrés divers, le rejet brutal des Arabes et plus généralement de l'Islam est la haine la mieux partagée en Occident. L'amalgame est total entre les problèmes des banlieues qui sont pour une large part des problèmes sociaux avec le chômage qui touche en moyenne trois fois plus les Beurs que les Français de souche. Cela on ne l'explique pas car l'argument mis en place est l'antisémitisme mis en avant d'une façon directe ou indirecte par les «plus royalistes que le roi».

Justement et pour parler d'oecuménisme dans la haine des Arabes, un auteur anglais pense que la France est en guerre contre «ses Arabes». Nolwenn Le Blevennec a interviewé Andrew Hussey. Nous l'écoutons: The French intifada est sorti ce jeudi. C'est un livre-voyage-enquête qui se propose d'expliquer «la guerre entre la France et ses Arabes». (...) La couverture du livre, en premier lieu: la tour Eiffel, dessinée entre les portes d'une mosquée dorée et dressée dans des flammes rouges. Derrière, en fond, le vert du Coran. Pour la version américaine, c'est encore plus explicite: un bras d'homme tenant une kalachnikov sur un fond bleu clair.(2)

«Les extraits parus dans le Guardian, fin février, n'étaient pas rassurants non plus. Ils donnaient l'image d'une capitale française assiégée par ses Arabes. Voici le premier qui dépeint les émeutes de la gare du Nord du printemps 2007. C'est le début du livre: «La France, écrit-il, est le pays qui a la plus grande population musulmane d'Europe, et la gare du Nord est un point de rencontre et de tension. (..) Les émeutiers de la gare du Nord ou des banlieues se décrivent souvent comme des soldats d'une ´´guerre d'usure´´ contre la France et l'Europe.» La prose ressemble à celle de l'auteur d'extrême droite, Laurent Obertone (belle plume et apocalypse).»(2)


«Ce que j'ai vu en France, écrit Nolwenn Le Blevennec, rapportant les propos de l'auteur, n'est pas de l'ordre d'un conflit de classes, je me suis demandé d'où venait cette colère des jeunes Arabes. Les tensions ne sont pas que politiques, religieuses, raciales, il y a quelque chose qui appartient à la psychanalyse.» Sa théorie: la colonisation française de l'Afrique du Nord a laissé des traces et une envie de revanche. L'aliénation de la vie en banlieue est un autre motif de colère pour les Arabes. Une guerre a lieu, que personne ne veut voir.» (2)

«Dès la première partie (de la lecture du livre, Ndlr), c'est plus clair, la ligne est celle d'Alain Finkielkraut et d'Elisabeth Lévy. Première partie: le jeune Arabe est haineux et antisémite. L'auteur revient sur le meurtre d'Ilan Halimi. «Beaucoup de voisins ont entendu des cris de souffrance et les rires des tortionnaires, mais ils n'ont rien fait», écrit-il comme s'il avait eu accès au dossier de police. Puis il passe à l'affaire Mohammed Merah. Dans les jours qui suivent, (...) Il y a ce type, à Barbès qui n'est pas spécialement choqué par ce qu'a fait Merah. A mettre en parallèle avec les commentaires de ce vieux juif, «l'un des derniers à ne pas avoir été évincé de Barbès»: «Cet homme, ce musulman, il était juste un nazi.» (2)

«Suivent plusieurs chapitres historiques intéressants: Andrew Hussey rappelle quelle a été l'histoire de la France avec l'Algérie, le Maroc, la Tunisie. Il décrit les séquelles laissées par les processus de colonisation et décolonisation. Enfin, la dernière partie du livre se passe à la prison de Fresnes. Un gardien de prison se confie: «On peut parler avec un Basque ou un Corse. Avec les musulmans, ce n'est pas pareil, c'est comme s'ils formaient une armée secrète qui travaille contre toi. Tu ne peux jamais savoir ce qu'ils pensent, mais tu sais qu'ils te haïssent.» (2)

Etant plus explicite dans le Guardian, Andrew Hussey écrit: «L'histoire amère de la relation de la France avec ses ex-colonies se joue dans la capitale française est racontée plus explicitement dans le Guardian. Il y a un véritable conflit dans la France contemporaine entre les principes opposés de la laïcité et du communautarisme qui est joué dans les émeutes. Le terme laïcité est difficile à traduire; mettre tout simplement, cela signifie que le droit français, il est illégal de distinguer des individus en raison de leur religion. (...) Encore une fois, le modèle anglo-américain lâche, où la «différence» - qu'il s'agisse de la sexualité, la religion ou le handicap - est toléré ou même prisé, ne s'applique pas en France où la «différence» est considérée comme une forme de sectarisme et une menace pour la République. Le problème le plus aigu pour les dernières générations d'immigrés musulmans en France est que l'universalisme proclamé des valeurs républicaines, et en particulier la laïcité, peut très rapidement ressembler à la «mission civilisatrice» du colonialisme. En d'autres termes, si les musulmans veulent être «français», ils doivent apprendre à être des citoyens de la République, premier et deuxième musulmans; pour beaucoup, c'est une tâche impossible, d'où les inquiétudes quant à savoir si les musulmans en France sont musulmans de France ou musulmans en France». (3)



Les lanceurs d'alerte de l'apocalypse contre les allogènes mélanodermes


En France on le sait, les « formateurs » au sens de l’internet de la pensée du citoyen lambda sont connus. On ne peut pas, à titre d'exemple, ne pas citer l'un des premiers pyromanes en la personne d'Eric Zemmour, un paléo-berbère dont les parents sont venus sur le tard en France et qui en rajoute en parlant de «mélancolie française» et d'invasion par les mélanodermes qui soient arabes ou noirs. Ecoutons la description qu'en fait Chloé Leprince à propos de la délinquance consubstantielle de l'ethnie: «Oui, comme l'affirment Eric Zemmour et Jean-Pierre Chevènement, les personnes noires et maghrébines sont surreprésentées dans les statistiques de la délinquance. Ce qu'ils omettent de dire, c'est que ce phénomène est essentiellement dû à des facteurs sociaux et de discrimination. (...) Les propos d'Eric Zemmour peuvent être considérés comme racistes dans la mesure où ils seraient essentialistes (Mamadou serait trafiquant parce que Mamadou s'appelle Mamadou). Dans sa diatribe, Eric Zemmour ne parle pas de condamnations effectives, après enquête, mais de «trafiquants.» Même si les statistiques du Canonge restent à prendre avec des pincettes, il indique qu'Arabes et Noirs sont «surreprésentés» (comprendre: plus nombreux en proportion que dans la population totale). Les sociologues de la délinquance retiennent davantage le critère du niveau de vie que le critère ethnique pour expliquer les différences de comportement transgressif: pour ces derniers, qu'il y ait davantage de Noirs et d'Arabes parmi les jeunes délinquants n'est pas vraiment un scoop. Mais avant tout, le corollaire d'un phénomène socio-économique. (4)

Un nouveau business : les auteurs à thèses racistes contre les Arabes

Il ne faut pas croire que les Alain Finkielkraut, Elisabeth Levy et autres Pascal Bruckner sont les seuls à gloser sur les Arabes. De nouvelles pousses se font les dents sur ces scories de l'histoire installées en Occident.

Nolwenn Le Blevennec décrit l'ouvrage de Laurent Obertone La France Orange mécanique, qui se vend bien. Le thème de l'ouvrage est «l'ensauvagement d'une nation», formule chargée de sous-entendus de l'essayiste et criminologue Xavier Raufer qui préface le livre. (...) Une formule devenue le slogan du moment de Marine Le Pen qui fait au livre une promo acharnée (...) «Ses thèmes de prédilection en vrac: le péril immigré qui mènera notre civilisation à sa perte, les Noirs qui ont une ´´intelligence limitée´´, les homosexuels qui se ´´comportent eux aussi comme des animaux´´, les logements sociaux et ´´l'invasion de cloportes qui vont avec´´, ainsi que l'égalité homme-femme.» « La France Orange mécanique » poursuit Nolwenn Le Blevennec, est un livre à thèse, où les statistiques viennent étayer ou illustrer un discours qui fait beaucoup penser à celui du journaliste Eric Zemmour ou de Marine Le Pen. En gros, la France serait gangrénée par l'ultraviolence. Et si les tueurs de sang-froid (psychopathes) ou de sang chaud (à la Bertrand Cantat) peuvent être blancs, les acteurs de l'ultraviolence, violeurs et agresseurs, seraient le plus souvent des hommes jeunes d'origine étrangère. (...) Parmi ces hommes d'origine étrangère, «quelques cultures» seraient surreprésentées, «les Sahéliens et les Maghrébins par exemple». Comme Zemmour, il s'appuie sur les travaux d'Hugues Lagrange. «Je ne pense pas qu'on puisse tout expliquer par des causes sociales. L'ethnie ne peut pas être ignorée. Je ne suis pas sûr que notre société soit compatible avec toutes les cultures.» (5)


Contrôles au faciès: démonétisation de l'allogène

Justement, à propos des statistiques, Chloé Leprince de Rue 89 rapporte une enquête sur l'inutilité dans les faits du contrôle au faciès. Elle écrit: «Deux chercheurs du Cnrs publient une enquête statistique alarmante sur le contrôle au faciès: un Arabe est sept à huit fois plus contrôlé qu'un Blanc par la police française. Pour un Noir, c'est six fois plus probable. Ces chiffres publiés le 30 juin 2009 sont édifiants. Mais ils se doublent d'un autre enjeu: celui de l'inefficacité de ces moeurs policières. Alors que la Préfecture de Paris a manifesté son «intérêt» pour l'enquête, on sait que le contrôle au faciès, non seulement discrimine, mais qu'en plus, il ne marche pas. (...) Cette étude de portée européenne montre que dans la plupart des pays européens, le profilage ethnique s'est imposé. Ainsi, en Grande-Bretagne, les Britanniques d'origine asiatique ont été cinq fois plus contrôlés à partir des attentats dans le métro de Londres, à l'été 2005. Or, les mêmes auteurs, déjà formels, écrivaient qu'il n'existe «aucune preuve que le profilage ethnique puisse prévenir les actes criminels ou les actes de terrorisme.» (6)

On sait aussi que «des consignes sont données oralement qui relèvent bien du contrôle sur la couleur de la peau ou l'apparence ethnique «Si vous êtes à Calais et que vous devez faire du chiffre, qu'est-ce qui ressemble plus à un Afghan ou à un Irakien qu'un Afghan ou un Irakien?» On le voit, les Arabes et autres mélanodermes ont du souci à se faire. La tâche pour une intégration sereine et apaisée et qui ne repose que sur le désir de vivre ensemble ne sera pas tâche facile avec tous les pyromanes pour qui l'intégration apaisée à l'ombre des lois de la République est un danger mortel pour leur fonds de commerce de la division et de l'intolérance. Ainsi va le Monde.


1. Jacques Berque: http://www.islam-fraternet.com/maj-0598/berq.htm

2. Nolwenn Le Blevennec http://rue89.nouvelobs.com/2014/03/08/auteur-anglais-pense-france-est-guerre-contre-arabes-250205


3. http://www.theguardian.com/world/2014/ feb /23/french-intifada-arab-banlieues-fighting-french-state-extract


4. Chloé Leprince http://rue89.nouvelobs. com/2010/03/19/noirs-arabes-et-delinquance-retour-sur-zemmmour-143594


5. http://rue89.nouvelobs.com/2013/03/01/rencontre-avec-lauteur-zemmourien-de-la-france-orange-mecanique-240132


6. Chloé Leprince http://rue89.nouvelobs. com/2009/06/30/controles-au-facies-scandaleux-mais-aussi-inefficaces

Professeur Chems Eddine Chitour

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8 mars 2014 6 08 /03 /mars /2014 12:43

«Une chandelle à un kopeck a fait brûler Moscou»

Proverbe russe

La suite du feuilleton ukrainien: l'Europe comme un seul homme a pris des sanctions contre la Russie sans s'interroger sur les motifs réels de cette escalade et quelle est la responsabilité de l'Occident. Il semble qu'il y ait une décantation, la Russie semble prête à accepter que l'Ukraine échappe à son orbite, il lui reste deux cartouches, la région russophone de Donetz qui manifeste contre l'illégalité du pouvoir central installé de force par l'Occident à Kiev. La deuxième cartouche, de loin la plus importante, est comment récupérer la Crimée. Nous savons qu'elle a toujours appartenu à la Russie après l'avoir arrachée à l'Empire ottoman. Ce n'est qu'en 1954 que Nikita Kroutchev la rattache à l'Ukraine pensant ainsi sceller l'entrée de l'Ukraine dans le giron russe depuis 300 ans...

En 1991, tout en étant de majorité russophone, la Crimée a été finalement rattachée en tant que République autonome de Crimée, à une Ukraine devenue indépendante. Sa capitale est Simféropol. La péninsule est réputée pour ses vignobles, ses vergers, ses lieux de villégiature, ses sites archéologiques et ses zones touristiques, telle la station balnéaire de Yalta où ont été signés en 1945 les accords historiques entre Staline, Roosevelt et Churchill. La ville de Sébastopol, grand port de guerre sur la mer Noire au sud-ouest de la péninsule, ne fait plus partie de la République autonome de Crimée. Son secteur possède un statut administratif spécial au sein de l'Ukraine. Selon le recensement ukrainien de 2001, la population de Crimée comptait 2 033 700 habitants. Sébastopol est rattachée aux subdivisions de l'Ukraine; mais avec un statut particulier. En 2010, après de longues négociations, l'Ukraine prolonge le bail de la Russie sur le port de Sébastopol, jusqu'en 2042. La ville reste indépendante de la République autonome de Crimée et jouit d'un statut particulier au sein de la République d'Ukraine. Par ailleurs, Moscou conserve sa base militaire hautement stratégique, où sa flotte de la mer Noire stationne depuis le xviiie siècle.


Histoire brève de la Crimée

Correspondant à l'antique Tauride, elle a successivement fait partie, depuis le xve siècle, de l'Empire ottoman, de l'Empire russe et de l'Union des républiques socialistes soviétiques. Pour l'histoire récente la Crimée a été conquise par la Russie au xviiie siècle sur les Tatars, vassaux de l'Empire ottoman. À l'issue de la guerre russo-turque de 1768-1774 la Tauride et la Crimée devinrent russes.(... En 1853, l'Empire ottoman en plein déclin décida, avec le soutien de la Grande-Bretagne et de la France, de mettre un coup d'arrêt à l'expansion économique russe. Les alliés de circonstances attaquèrent la péninsule. Le conflit de 1854-1856 fut extrêmement meurtrier: 750 000 hommes périssent en trois ans. Cette guerre ruina durablement l'économie et les structures sociales de la Crimée. Ce fut surtout après 1860, que la Crimée se releva et devint une véritable riviera russe. Beaucoup de Tatars de Crimée, déjà réduits en nombre par l'émigration forcée vers l'Empire ottoman au xviiie et au début du xixe siècle, durent quitter la région en raison des guerres russo-ottomanes, de persécutions et de confiscations de terres. À la fin de la Première Guerre mondiale, après le retrait des Allemands à l'issue de la guerre, les bolcheviks russes furent confrontés aux indépendantistes de la République populaire ukrainienne, reconnue par la France et la Grande-Bretagne en janvier 1918, et qui déclare son indépendance le 22 janvier 1918, tandis que les forces anglaises et françaises s'installèrent à partir de novembre 1918 dans les principaux ports.»(1)

«Pendant la Seconde Guerre mondiale la Crimée fut le théâtre de sanglantes batailles où la Wehrmacht subit de nombreuses pertes pendant sa progression vers l'est. Les troupes soviétiques libérèrent définitivement la ville de Sébastopol en mai 1944. Les Tatars de Crimée furent tous déportés, sans exception, sous l'accusation d'avoir aidé les Allemands: le 30 juin 1945, la République socialiste soviétique autonome de Crimée fut abolie et rétrogradée en oblast de Crimée. Cet oblast resta néanmoins au sein de la République socialiste fédérative soviétique de Russie. En 1967, les Tatars de Crimée seront réhabilités; mais sans pour autant être autorisés à revenir dans la péninsule. Ils n'accéderont à ce droit qu'après la chute de l'Union soviétique.» (1)

«En début 1992, l'Ukraine réaffirme sa pleine souveraineté sur la Crimée. Cette situation provoqua entre la Russie et l'Ukraine, de nombreuses tensions (exacerbées par la présence sur la péninsule de l'ex-flotte soviétique de la mer Noire). La Crimée travailla alors à un projet de Constitution. Autre point de discorde, le retour et la réinstallation des Tatars de Crimée commence dans le même temps sur la péninsule. Et pour l'heure, leur langue n'est pas reconnue officiellement. Le peuple tatar est aujourd'hui toujours réparti en diaspora, en Asie centrale ou en Turquie. Le nombre des descendants des Tatars de Crimée présents en Turquie est estimé à 4 millions de personnes. Ces descendants de Tatars de Crimée qui résident en Turquie ne parlent plus leur langue d'origine, mais le turc. Le 5 mai 1992, la Crimée proclame sa première Constitution de La Crimée a donc décidé de rester au sein de l'Ukraine, mais en tant que région à statut spécial. Les langues officielles de la Crimée resteront le russe et l'ukrainien. La ville criméenne de Sébastopol accèdera à un statut spécial en Ukraine. Son arsenal portuaire de Sébastopol restera à la Russie, qui continuera à y entretenir sa flotte militaire stratégique du Sud.» (1)


Le rouleau compresseur des agressions occidentales

Depuis que l'Ukraine lit-on sur Wikipédia, a quitté l'orbite russe, le camp occidental continuant sur sa lancée de la disparition de l'Union soviétique n'a eu de cesse de provoquer la Russie en tentant de lui demander de réduire son influence d'abord, en dynamitant la CEI (suite de la débâcle de l'empire soviétique) en lui soustrayant les pays baltes. Ainsi, lit-on sur Wikipédia: «Le 19 juillet 1994, Leonid Koutchma (1994-2005) est élu 1er président d'Ukraine. Le 17 mars 1995, le Parlement d'Ukraine abolit la Constitution criméenne de 1992. De juin à septembre, c'est le président d'Ukraine, Koutchma, qui gouverne directement la Crimée par décrets présidentiels. Il en résulte un nouveau clivage entre pro-Russes et pro-Occidentaux, à l'intérieur même de l'Ukraine et de la Crimée. Des tensions ressurgissent alors concernant le statut de la ville de Sébastopol et sur les questions relatives à un éventuel retrait de la flotte russe stationnant en mer Noire. Le Parlement de Crimée vote alors une nouvelle série de lois constitutionnelles (octobre 1995), qui seront longtemps contestées par les autorités ukrainiennes, car affirmant l'autonomie de la Crimée. La situation restera bloquée pendant plusieurs années.» (1)

«Mais par la suite, grâce aux défaites des partis nationalistes ukrainiens et de celles des partis pro-européens nés de la chute du bloc soviétique, la Russie exerce à nouveau une influence certaine dans les affaires intérieures de l'Ukraine, et surtout de la Crimée. La Russie facilite la distribution de passeports russes à la population russophone de Crimée. Dans les années 1990 - 2000, la Géorgie indépendantiste connaît une semblable «passeportisation» des russophones Abkhazes et Ossètes du Sud qui veulent se rapprocher de la Russie. En 1997, le rattachement de la Crimée en statut autonome de l'Ukraine est officiellement reconnu par la Russie. La Crimée n'est pas un État souverain de plein droit. Mais son intégrité territoriale est affirmée sur le principe d'autonomie assorti d'une composition nationale particulière. Et enfin, elle possède son propre organe représentatif, la Verkhovna Rada (Parlement), un Conseil des ministres (organe exécutif), et un chef d'État. Après les années 2000 et à la suite de la crise économique de 2008-2009, elle chute tout à coup de 15%. Kiev est alors obligé de s'endetter auprès du FMI (en parallèle à ces événements, l'Ukraine qui a des difficultés à régler ses factures, fait fasse aux conflits gaziers russo-ukrainiens de 2005 à 2009. Ces évènements alimentent en arguments les mouvements pro-occidentaux de l'opposition ukrainienne et font monter les mécontentements dans les régions de l'Ouest qui, sur le plan économique, sont les moins riches de l'Ukraine.»(1)


Les provocations occidentales

Le débarquement de matériel militaire américain via l'Otan, le 27 mai 2006, dans le port criméen de Théodosie (Feodossia, en Crimée), en prévision de l'exercice Sea Breeze 2006, ravive fortement les querelles en Ukraine, ainsi que les passions en Crimée. Et l'autorisation de débarquement avait été donnée par le 3éme président d'Ukraine, le pro-occidental Viktor Iouchtchenko (2005-2010; alors que constitutionnellement, la décision relevait du seul Parlement ukrainien.» (1) Les élections législatives de 2007 donnent logiquement la victoire au Parti des régions de Ianoukovytch. Mais les «forces pro-occidentales» de Notre Ukraine et du Bloc Ioulia Tymochenko s'allient pour former un gouvernement de coalition. De plus, le «Parti des régions» qui est russophone et dirigé par Volodymyr Rybak, remporte sans surprise les élections parlementaires criméennes, avec une majorité écrasante (80 des 100 sièges). Courant 2013, l'Union européenne propose un accord d'association avec une Ukraine dont les caisses étatiques sont à nouveau vides. Mais le président russe, Vladimir Poutine, ambitionne un rapprochement des pays anciennement soviétiques. Il fait des propositions d'aide à l'Ukraine pour 15 milliards de dollars. Et le Parlement ukrainien décide finalement, de refuser par vote l'accord de l'Union européenne. En novembre 2013, des manifestations dites «Euromaïdan» issues de l'ancienne révolution orange (2004-2005) commencent dans l'ouest du pays et dans la capitale de l'Ukraine; régions à tendances pro-européennes. Le 22 février 2014, ces manifestations devenues très violentes aboutissent à la prise du palais présidentiel et de l'Assemblée parlementaire de Kiev; ainsi qu'à la destitution du 4éme président d'Ukraine, le pro-russe Viktor Ianoukovytch (2010-2014), Parti des régions ». (1)

« En fin février 2014, suite au changement de pouvoir à Kiev, la république de Crimée, région très majoritairement russophone, est en proie à des tensions séparatistes de l'Ukraine. La Crimée annonce qu'elle ne reconnaît pas le nouveau président ukrainien (23 février 2014) par intérim, Olexandre Tourtchinov et ses nouvelles autorités provisoires en Ukraine. Le 27 février 2014, le Parlement de la Crimée vote la tenue d'un référendum sur la question d'une autonomie renforcée vis-à-vis de Kiev (...) Le 1er mars 2014, des groupes criméens d'autodéfense armés, ainsi que des troupes et blindés russes basés dans le port criméen de Sébastopol, se répartissent sur des points stratégiques de la péninsule de Crimée, Le 6 mars, les atlantistes se réunissent et évoquent des rétorsions et sanctions non militaires. Le même jour, la région proclame son rattachement à la Russie et le Parlement de la République autonome vote l'organisation d'un référendum le 16 mars 2014 pour le confirmer.» (1)

La mécanique diabolique de l'Otan

En Ukraine, moins d'une semaine après l'arrivée de troupes en Crimée, un référendum est annoncé pour le 16 mars sur le rattachement de cette région à la Russie. A l'issue d'un sommet extraordinaire consacré à la crise ukrainienne, jeudi 6 mars, l'Union européenne a annoncé les premières sanctions politiques contre la Russie. Les dirigeants européens ont décidé de suspendre les négociations sur les visas avec Moscou et menacé de prendre davantage de sanctions, notamment économiques, si la situation continuait à se détériorer en Ukraine. Aux Etats-Unis, Barack Obama a ordonné la mise en place de restrictions de visas «sur un certain nombre de responsables et d'individus» qui sont tenus pour «responsables ou sont complices de menacer la souveraineté» de l'Ukraine, selon la Maison-Blanche. Le président américain a par ailleurs, signé un décret qui autorise des gels d'avoirs, visant potentiellement.

Pour Michel L'homme tout est calculé: «La Sixième flotte américaine, l'une des plus grandes flottes du monde, se déplace vers la Crimée. C'est environ 40 navires, 175 avions et 21 000 personnes. Des troupes de l'Otan auraient aussi débarqué en Ukraine occidentale dans la région de Lviv. Ces informations proviennent directement du député du peuple de l'Ukraine, Oleg Tsarev. Selon lui, un débarquement de soldats de l'Otan se déroule à Lviv.» On signale aussi la présence de soldats ukrainiens dans les navires de guerre américains de mer Noire. Ainsi, alors que l'on parle de dialogue, de diplomatie, les deux fronts américano-russe se rapprocheraient militairement de la confrontation. Des chars polonais ont été aperçus se déplaçant le long de la frontière avec l'Ukraine. L'armée turque a été placée en état d'alerte. Barack Obama insiste et récidive en dénonçant faussement une violation par Moscou du droit international, jugeant que la Russie est du «mauvais côté de l'Histoire» en Ukraine. Les Occidentaux n'ont-ils pas délibérément violé le Mémorandum de Budapest de 1994?» (2)

«Pourquoi tant d'acharnement poursuit Michel L'homme? En fait, la situation financière de l'Occident est au bord d'un krach boursier sans précédent, d'un vide abyssal. Saisir «économiquement» la Russie, c'est aussi comme en Libye racheter ses banques, opérer une razzia et entraîner tout l'Est de l'Europe dans le consumérisme américain, s'approprier les plaines riches de l'Ukraine et ses matières premières. Cette opération de main basse étatsunienne sur l'Ukraine a commencé quand, en 1991, s'est désagrégée l'Union soviétique. A la place d'un seul Etat, il s'en était formé quinze, dont l'Ukraine. Les Etats-Unis et leurs alliés européens se sont alors activés pour tirer le plus grand avantage de la nouvelle situation géopolitique. Les premiers pays de l'ex-Pacte de Varsovie (Pologne, République tchèque et Hongrie) rejoignent très vite l'Union européenne et l'Otan. Puis, en 2004 et 2009, l'Otan incorpore l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Bulgarie, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Croatie et l'Albanie. L'Ukraine, dont le territoire de 600.000 km² fait tampon entre l'Otan et la Russie, et qui est traversé par les couloirs énergétiques entre la Russie et l'Union européenne reste par contre autonome (Mémorandum de Budapest) » (2).

« Mais l'Ukraine, conclu Michel L’Homme, entre dans le «Conseil de coopération nord-atlantique» et, en 1994, dans le «Partnership pour la paix», en contribuant aux opérations de «peacekeeping» dans les Balkans. En 2002 a été adopté le «Plan d'action Otan-Ukraine» et le président ukrainien de l'époque, le président Kuchma annonça alors son intention d'adhérer à l'Otan. En 2005, dans le sillage de la «révolution orange», le président Yushchenko fut invité au sommet Otan à Bruxelles. Immédiatement après, était lancé un «dialogue intensifié sur l'aspiration de l'Ukraine à devenir membre de l'Otan» et, en 2008, le sommet de Bucarest donna le feu vert pour cette adhésion. On saisit maintenant la décision ultime du 'grand coup'': l'Otan se sent sûre de pouvoir accomplir un nouveau pas dans son extension à l'Est, en englobant dans ses plans la moitié de l'Ukraine et en réservant la moitié pauvre du territoire à l'Union européenne».(2)

A qui le tour si des pays anciens qui ont sédimenté peuvent être mis en pièce Que dire e pays en pleine errance qui fotn plus dans des certitudes qui tiennent de la méthode Coué que d’une réelle force?


1. La Crimée: Encyclopédie Wikipédia


2. Michel Lhomme le 21/02/2014 http://www.metamag.fr/metamag-1846-L-Ukraine-guerre-civile-Coup-d-Etat-ou-debut-du--grand-coup--.html.html

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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8 mars 2014 6 08 /03 /mars /2014 12:36

«Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde»

Aimé Césaire (Discours sur le colonialisme)

Encore une fois, l'actualité nous rattrape. Nous avons beau faire les civilisés en taisant nos douleurs ancestrales pour être politiquement corrects. Il n'empêche que ce vernis saute à la première réminiscence. Il s'agit cette fois d'un cri du cœur qui est celui du procès du colonialisme, encore et toujours. On apprend que 14 pays africains - les anciennes AOF et AEF fruit d'un imaginaire Empire français - ont été contraints par la France à payer l'impôt colonial pour les avantages de l'esclavage et de la colonisation. Nous voyons donc que la colonisation dans ce qu'elle a de positif comme oeuvre, n'est pas sortie de l'imaginaire délirant de quelques nostalgériques – nostalgiques de l’Algérie française- mais que la certitude d'appartenir à la race des seigneurs a un substrat plus profond.


La double peine: massacres de masse et impôt colonial post-indépendance

Il est pour le moins admis que le colon en fait, qui est venu tuer, piller, voler s'est enrichi honteusement - il n'est que de se souvenir du hold-up de la Casbah d'Alger- magistralement décrit par Pierre Péan - on y apprend en effet, que 200 millions de francs or ont été dérobés par les généraux de l'Armée d'Afrique qui eurent à se disputer le butin avec leurs troupiers, mais pas seulement, il y eut aussi des agioteurs qui s'enrichirent à vil prix, l'Algérie était à vendre et on dit que la richesse de la maison Sellière serait due en partie à la rapine du trésor d'Alger. On apprend par la même qu'il soumet à la double peine les anciennes colonies en leur demandant de rembourser les constructions réalisées pour son propre confort et qu''il revend au prix fort après usage.

Dans cet ordre, Mawuna Remarque Koutonin écrit: «Le saviez-vous? 14 pays africains contraints par la France à payer l'impôt colonial pour les ´´avantages´´ de l'esclavage et de la colonisation. Le saviez-vous? Aujourd'hui encore, beaucoup de pays africains continuent de payer un impôt colonial en France, et ce malgré l'indépendance! (...) Lorsque Sékou Touré de Guinée décida en 1958 de sortir de l'Empire colonial français, et opta alors pour l'indépendance du pays, l'élite coloniale française à Paris s'est indignée, et dans un acte de fureur historique, demanda à son administration alors en place en Guinée de détruire, dans tout le pays, ce qui représentait, à leur yeux, les avantages de la colonisation français.» (1)

«Trois mille Français quittèrent le pays, en prenant tous leurs biens et détruisant tout ce qui ne pouvait être déplacé: les écoles, les crèches, les bâtiments de l'administration publique furent détruits, les voitures, les livres, les médicaments, les instruments de l'institut de recherche, les tracteurs ont été écrasés et sabotés et les nourritures entreposées furent brûlées ou empoisonnées». (1)

L'auteur nous apprend que les dirigeants de pays nouvellement indépendants ne pouvaient sortir des griffes de l'ancien colonisateur. Ils durent mettre en place une sorte de néo-colonialisme à distance sans les anciens colonisateurs: «Pour les pays nouvellement indépendant il fallut trouver des compromis avec la France. Sylvanus Olympio, le premier président de la République du Togo, un petit pays d'Afrique de l'Ouest, trouva une solution susceptible de calmer les Français: ne voulant pas continuer à subir une domination française, il refusa de signer le pacte de la colonisation proposé par De Gaulle, mais accepta en contrepartie de payer une dette annuelle à la France pour les soi-disant avantages obtenus lors de la colonisation française. Ce furent les seules conditions de la France pour ne pas détruire le pays avant de partir. Toutefois, le montant estimé par la France était si grand que le remboursement de la soi-disant «dette coloniale» était proche de 40% du budget du pays en 1963. Dès lors, la situation financière du Togo tout juste indépendant fut très instable, et afin de se sortir de cette situation, Olympio décida de sortir du système monétaire mis en place par la France coloniale le Fcfa (franc des colonies françaises d'Afrique), et créa la monnaie du pays. Le 13 Janvier 1963, trois jours après, qu'il ait commencé à imprimer les nouveaux billets, une escouade de soldats (soutenus par la France) s'empara et tua le premier président élu de l'Afrique indépendante: Olympio fut exécuté par un ex-Légionnaire français, le sergent de l'armée, Etienne Gnassingbé qui, au passage, reçut à ce moment une prime de 612 dollars de l'ambassade française locale pour le succès de sa mission.» (1)

«En fait, au cours des 50 dernières années, un total de 67 coups d'Etat qui se sont passés dans 26 pays en Afrique, 16 de ces pays sont des ex- colonies françaises, ce qui signifie que 61% des coups d'Etat en Afrique ont été initiés dans d'anciennes colonies françaises. En ce moment même où j'écris cet article, 14 pays africains sont obligés par la France, à travers le pacte colonial, de mettre 85% de leurs réserves à la Banque centrale de France sous le contrôle du ministère des Finances français. Jusqu'à maintenant, en 2014, le Togo et environ 13 autres pays africains doivent encore payer la dette coloniale en France.»


Le pacte de colonisation que l'on ne peut pas refuser

Voici, conclut l'auteur, le bréviaire des 11 principales composantes de la poursuite du pacte de colonisation depuis les années 1950: Les pays nouvellement «indépendants» doivent payer pour l'infrastructure construite par la France dans le pays pendant la colonisation. Les pays africains doivent déposer leurs réserves monétaires nationales en France à la Banque centrale. En bref, plus de 80% des réserves de change de ces pays africains sont déposées dans les «comptes d'opérations» contrôlés par le Trésor français. La finalité reste: les pays africains n'ont pas accès à cet argent. La France leur permet d'accéder à seulement 15% de leur argent par an. S'ils ont besoin de plus, les pays africains doivent emprunter, à des taux commerciaux, sur les 65% de leur argent détenu au Trésor français. L'ancien président français, Jacques Chirac, a récemment parlé de l'argent des pays africains dans les banques en France. ´´Nous devons être honnêtes et reconnaître qu'une grande partie de l'argent dans nos banques vient précisément de l'exploitation du continent africain.» A titre de comparaison historique, la France a fait payer à Haïti l'équivalent moderne de 21 milliards de dollars de 1804 à 1947 (près d'un siècle et demi) pour les pertes causées aux marchands d'esclaves français suite à l'abolition de l'esclavage et à la libération des esclaves haïtiens.»

En rançonnant la première République noire de 180 millions de Francs or, ramenés par la suite à 90 millions (17 milliards d'euros!) La grande fortune de la France vient en droite ligne du commerce triangulaire, l'esclavage. Les villes comme Nantes ont un passé tristement colonial dans le commerce du bois d'ébène. C'est le commerce des humains qui a permis de lancer l'industrialisation, les chantiers navals, l'acier. Sans l'esclavage, la France ne serait qu'un pays parmi les autres plus qu'un pays parmi d'autres.


Le discours de Dakar symptomatique de l'appartenance à une race supérieure


Relisons ensemble le discours de Dakar de Sarkozy du 26 juillet 2007, pour comprendre cette suffisance post-coloniale représentée par la «Françafrique», la France à fric dirions-nous pour être en phase avec la réalité du calvaire africain. Le président français déclare notamment que la colonisation fut une faute tout en estimant que le «drame de l'Afrique» vient du fait que «l'homme africain n'est pas assez entré dans l'Histoire. [...] Le problème de l'Afrique, c'est qu'elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l'enfance. [...] Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n'y a de place ni pour l'aventure humaine ni pour l'idée de progrès». (2)

«Je ne suis pas venu, poursuit Nicolas Sarkozy, nier les fautes ni les crimes car il y a eu des fautes et il y a eu des crimes. Il y a eu la traite négrière, il y a eu l'esclavage, les hommes, les femmes, les enfants achetés et vendus comme des marchandises. Et ce crime ne fut pas seulement un crime contre les Africains, ce fut un crime contre l'homme, ce fut un crime contre l'humanité toute entière. (...) Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire. (...) Jamais l'homme ne s'élance vers l'avenir. Jamais il ne lui vient à l'idée de sortir de la répétition pour s'inventer un destin (... ) Le défi de l'Afrique, c'est d'entrer davantage dans l'histoire). (2)

M. Sarkozy ne s'est jamais interrogé sur le fait que si les Africains, les Algériens, n'ont pas été brutalement envahis, pillés tués, perturbés dans leur identité, ils auraient peut-être rattrapé le train du progrès. La France a empêché par tous les moyens les Africains de rentrer dans l'Histoire.

La révolte de 1871 en Algérie: meurtres, pillages, bagne et imposition de sanctions


Un autre exemple des méfaits de la colonisation est celui qui a eu lieu en Algérie, sans être exhaustif, nous rapportons le tragique de l'insurrection de 1871 du bachagha Mokrani:
«La répression lit-on est très sévère et se traduit, une fois matée l'insurrection, par des internements de plus de 200 et en Nouvelle-Calédonie (on parle des «Algériens du Pacifique») mais aussi par d'importantes confiscations de terres, qui ensuite ont obligé de nombreux Kabyles à s'expatrier. La Kabylie se vit infliger une amende de 36 millions de francs or. Meurtrie, plongée dans le dénuement le plus total, la population vécut alors une véritable tragédie, dont la mémoire fut transmise de génération en génération par la littérature et la poésie orale.» (3)

«Malheureusement, le bilan des pertes algériennes en vies humaines ne cesse de s'alourdir depuis la fin de l'insurrection, pratiquement en juillet 1871. Cela explique la politique de la terre brûlée menée par les autorités coloniales qui ont recours à la liquidation physique pratiquée de sang-froid dans les douars et mechtas. Les peines prononcées dans les différentes phases des procès sont lourdes dans la mesure où la plupart des accusés sont condamnés à mort et la peine est exécutée pour bon nombre d'entre eux. Les autres ont vu leur peine commuée en détention à vie avec déportation comme Cheikh Al Haddad et son fils Aziz eu égard à leur rang: ils sont médaillés de la Légion d'honneur. Boumezrag est capturé, jugé et condamné à mort, mais verra sa peine commuée en travaux forcés à perpétuité et sera déporté en Nouvelle-Calédonie. Boumezrag, Aziz et M'hand Al Haddad figurent parmi les quelque 500 Algériens déportés en Nouvelle-Calédonie. Ils sont embarqués le 10 mars 1873 à bord des vaisseaux Calvados et de La Loire du port de Brest, en Bretagne. Après cinq mois de navigation, ils arrivent à Nouméa, la capitale de la Nouvelle-Calédonie, le 17 septembre de la même année. Des dizaines d'entre eux sont morts au cours du voyage, faute de nourriture et de soins. Le régime des déportés est des plus durs. Leurs bourreaux excellent dans l'art de l'asservissement et l'humiliation.» (3)

«A cette insurrection essentiellement politique dans ses causes et dans ses grandes lignes, il aurait fallu une répression politique appliquée par le gouvernement, une répression ne s'inspirant que de la raison d'État, des intérêts de la colonisation et des nécessités du milieu indigène. Cette répression, indiquée dès les débuts par plusieurs officiers des affaires indigènes, aurait pu être: 1° - La déportation à vie, en Océanie, des unités familiales les plus compromises dans chacune des tribus insurgées. 2° - La confiscation des biens de ces familles. 3° - Une contribution de guerre payable en terre ou en argent et garantie jusqu'à complète libération par le séquestre apposé sur les terres des tribus compromises.»(3)

«Ce furent, lit-on dans la même contribution, les tribunaux qui eurent la tâche ingrate de déterminer les peines encourues par les individus. De sorte que les mêmes gens furent traités, à la fois et simultanément, comme des belligérants vaincus, comme des sujets algériens, et comme des Français. Comme belligérants vaincus, ils se virent imposer par le gouverneur général, sur les propositions des chefs militaires, une amende de guerre de 36,582,298 francs, chiffre calculé d'après le nombre de fusils, le nombre de feux ou le quantum des impôts, et arbitrairement fixé en raison de la résistance faite à nos troupes ou même à nos agents administratifs: car, chose singulière et que personne ne releva. Cette contribution de guerre fut infligée à des tribus sahariennes et à des gens de l'Aorès et du Souf qui n'avaient jamais tiré un coup de fusil contre nous, mais qui étaient restés en état d'insoumission, quand personne n'était là pour les commander. Comme indigènes algériens, les insurgés furent frappés administrativement en vertu de la législation spéciale sur le séquestre, et ils durent payer, en terre ou en argent, une somme uniformément fixée à la valeur du cinquième de leur capital immobilier. Les individus les plus compromis, virent la totalité de leurs biens mobiliers et immobiliers confisqués, De ce chef, les insurgés payèrent environ 26,629,953 francs, qui furent représentés par des payements en argent jusqu'à concurrence de 7,933,860 francs, et par l'abandon de 446,406 hectares estimés a 18,696,093 francs.» (3)

Au total, 100.000 Algériens morts, saisie des terres, émigration de beaucoup d'Algériens (surtout vers la Syrie), déportation d'une partie des révoltés, et parution de l'infâme code de l'indigénat en 1881, mais ceci est une autre histoire

On ne peut parler justement des déportés sans citer quelques paroles douloureuses de la chanson interprétée magistralement par Akli Yahyaten - que Dieu lui prête longue vie - pour avoir su nous faire vibrer:

«Aw ki dawni le tribunal jadarmiya kbaar wisghaar aa wissensla tewzen qantar darbouni aam wa n´haar 3ala dakhla haffouli raas wa aataouni zawra ou payas goulou lommi matebkeesh yal menfi waldek rabbi mayy khalleesh.»

« Quand ils m’ont trainé au tribunal, les gendarmes en nombre, avec une chaine pesant un quintal, ils m’ont condamné à un an et un jour de déportation. A l’entrée, ils m’ont rasé la tête et m’ont donné une couverture et une paillasse. Dites à ma mère de ne pas pleurer, ton fils déporté ne sera pas abandonné par Dieu »

Cette supplique revendique deux repères: la religion et la mère. Cette mère, dernier lien ombilical qui lui reste et qu´il doit tenter de rassurer. Cette mère est en fait, notre mère, cette Algérie souffrante de voir ses meilleurs fils lui être arrachés pour l´inconnu et sans espoir de retour. Nous sommes assurément des nains juchés sur les épaules de ces géants qui ont commencé le combat libérateur- il faut s´en convaincre - dès l´arrivée de l´envahisseur. (4)

L´un des dossiers les plus pertinents que l´Algérie se doit de s´approprier est celui de la mémoire. Sans vouloir verser dans la concurrence victimaire, en Algérie nous avons trop tendance à pardonner par incompétence par crainte d´être mal vu, par paresse et surtout par méconnaissance de cette mémoire en miettes suite à un tsunami qui a eu lieu un certain jour de débarquement, le 14 juin 1830, sur une plage de Sidi Fredj. J´ai souvenance d´avoir vu, il y a quelques années, une délégation de petits descendants-Laïfa et les autres- des déportés de 1871. Ils étaient venus de Nouvelle-Calédonie à près de 20.000 km se ressourcer dans cette Algérie mythique que leur ont chantée leurs parents, de père en fils. J´avais naïvement demandé à ce qu´on mette en place une bibliothèque virtuelle pour consolider un lien de plus en plus ténu depuis près de 140 ans. Je ne suis pas sûr d´avoir été entendu.» (4)

En définitive La déportation coloniale plonge ses racines dans le XV siècle avec la traite des Noirs et l’esclavage. La France qui a proclamé en 2001, crime contre l’humanité l’esclavage et la traite négrière (loi Taubira) s’est rendu coupable d’une justice à deux vitesses . Elle a commis un crime contre l’humanité à l’endroit des déportés algériens et de tous les autres déportés ? Mieux Ce crime est encore plus odieux puisque la loi d’amnistie de de 1880 exclut du champ d’application les déportés algériens en Nouvelle Calédonie . C’est aussi cela l’œuvre positive de la France en Algérie

En définitive, le cri de Césaire retentit encore: il rappelle le caractère proprement inhumain de la colonisation à ceux qui sont aujourd'hui tentés d'en comptabiliser les «aspects positifs.»

1.Mawuna Remarque Koutonin http:// www.siliconafrica.com/france-colonial-tax/http://www.mondialisation.ca/le-saviez-vous-14-pays-africains-contrain...


2.http://fr.wikipedia.org/wiki/Discours_de_Dakar
3. http://www.dellys-life.com/sciences/histoire/518-dellys1871.html


4. http://www.lexpressiondz.com/chroniques/analyses_du_professeur_chitour/64496-L%E2%80%99amn%C3%A9sie-de-l%E2%80%99Alg%C3%A9rie-envers-ses-d%C3%A9port%C3%A9s.html

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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4 mars 2014 2 04 /03 /mars /2014 18:44

«Un homme politique pense aux prochaines élections, un homme d'Etat pense aux prochaines générations»

James Freeman Clarke

Une fièvre dangereuse s'empare des Algériens à l'approche de l'élection présidentielle Cette année est aussi l'année du soixantième anniversaire de la glorieuse révolution du 1er novembre qui il faut le regretter ne veut pas dire grand-chose pour les jeunes. A tort ou à raison, le débat se focalise sur l'empêchement ou non du président sortant à se porter candidat. On se souvient qu'à Sétif le président Bouteflika dans un aveu honorable avait convenu que la génération de la Révolution avait fait ce qu'elle a pu pendant un cinquantenaire pour diriger le pays mais que le moment est venu de passer le témoin à une autre génération pour une deuxième révolution, soixante ans après la première.

Nous allons montrer que les dangers que court le pays sont réels et que seul un consensus de tous permettra de faire émerger de nouvelles légitimités qui auront le difficile privilège d'amener l'Algérie à bon port, c'est-à-dire à lui donner une visibilité sur le plan international et surtout une «horma», « une dignité » qui ne peut être indexée sur les rodomontades des professionnels de politique mais sur une réelle puissance fruit du travail de la sueur, en un mot de l'intelligence, dans ce XXIe siècle de tous les dangers.

Souvenons-nous que toutes les anciennes frontières vont être redessinées. L'Empire et ses vassaux ne laisseront pas les peuples tranquilles. La crise actuelle que vit le pays est un tournant qui dépasse de loin les convulsions du microcosme politicien, où, pour bon nombre d'entre eux qui font dans l'agitation, on est à se demander quelle est leur valeur ajoutée en dehors de leur capacité de nuisance et de leur poids social réel ou supposé. De ce fait, les Algériens développent une véritable allergie et une réaction de rejet d'autant que pour la plupart sentant le vent tourner, ils vont dans le sens du vent ou au contraire, ils se découvrent sur le tard une âme de démocrate impénitents.

Pour ma part, je voudrai développer mon plaidoyer en tentant de convaincre que nous sommes déjà bons pour la partition 4e mandat ou pas, à moins d'un sursaut trans-partis et surtout de la société civile dont ce qu'elle compte de femmes et d'hommes plus intéressés par le destin du pays que par leur parcours personnel et surtout avec l'implication nécessaire de ceux qui ont déjà donné à ce pays et qui ne peuvent pas rester indifférents au sort qui attend cette Algérie plusieurs fois millénaire qui nous tient tant au cœur



Le poids réel de l'Algérie

Je voudrai de ce fait donner mon avis sur ce que nous pesons réellement sur l'échiquier mondial. Plus personne ne se souvient et certainement pas les jeunes de l'aura de la Révolution qui a terni rapidement au fil des années du fait, qu'en définitive, le peuple a changé de tutelle, il est passé du colonialisme à une forme de néocolonialisme endogène.

A l'extérieur, l'Algérie ne pèse pas lourd, c'est tout au plus un marché de 60 milliards de dollars dont il faut s'arracher les faveurs d'une façon ou d'une autre. Il est important de savoir que le monde sera de plus en plus dangereux et l'agressivité des nations sera proportionnelle à leur dépendance aux matières premières au premier rang desquelles il y a le pétrole. Comme toutes les ressources finies, la production de pétrole a commencé et finira à zéro. La seconde guerre du Golfe pourrait un jour s'avérer n'être que la deuxième. Il vient que le début de la pénurie de pétrole induira inévitablement des tensions.

Savons-nous que près des deux tiers parmi les Africains n'ont pas accès à l'électricité? D'ici 2030, la demande énergétique mondiale va augmenter. Les scénarii placent la fourchette entre 17 et 15 milliards de tonnes. On dit aussi que 200 à 700 millions de Terriens pourraient souffrir de pénuries alimentaires du fait du changement climatique. Les pénuries d'eau pourraient frapper, elles, entre 1,1 et 3,2 milliards d'êtres humains

On prévoit donc à côté des guerres pour l'énergie qui ont commencé avec le millénaire, des guerres de l'eau dans les prochaines années. Le monde est arrivé à un seuil. Ce qui était tenable dans les années 60 atteint ses limites. En 2025, la pression sur les sources d'énergie sera encore plus forte qu'aujourd'hui. La hausse des températures et la baisse de la pluviométrie concerneront surtout les régions arides et semi-arides comme l'Afrique du Nord, l'Afrique et le Moyen-Orient vont demeurer des régions d'instabilité chronique.

La pauvreté en Afrique va maintenir la pression migratoire... Nous ne pouvons rien sans avoir une utopie. Nous devons nous garder de nous endormir. La gestion de cette échéance de 2030 se prépare dès à présent. 2030 c'est véritablement une nouvelle civilisation qui va émerger. Veut-on y participer ou faire partie des «laissés-pour-compte» de ce que les spécialistes anglais de la prospective appellent les «zones grises», c'est-à-dire des peuples, voire des peuplades incapables de se gérer, parquées à la lisière du progrès et survivant grâce aux miettes que leur lancent épisodiquement les pays riches?

Que fait-on en Algérie?

L'Algérie importe tout; elle ne produit plus rien, nous consommons chinois, turc, nous habitons dans des maisons fabriquées par des Chinois, des Portugais, nous roulons dans des véhicules (une soixantaine de marques plus ou moins inconnues), nous avons 40 millions de portables et pourtant, nous sommes tragiquement sous-développés. Dans deux ans, à ce rythme de gaspillage, la rente ne suffira pas à nos importations débridées. Il est vrai que l'on nous promet du pétrole et du gaz pour cinquante ans quitte même à démolir Timimoune pour avoir du gaz de schiste au lieu et place de l'eau quantité rare dans le futur. Ce message est dangereux car il remet aux calendes grecques toute remise en ordre et tout réveil de l'Algérien pour qu'il se mette enfin au travail.

Du fait de l'absence de politique réelle des transports, les Algériens se rabattent sur l'achat de voitures qui, pour une grande part, dépassent les 120 g de CO2 au km. 3 milliards de dollars de carburants importés, ceci en partie pour alimenter la contrebande aux frontières marocaine et tunisienne. Il est urgent d'agir; cette politique d'assistanat est intenable, nous aurons de moins en moins de ressources et le gaspillage sera de plus en plus important. Pourquoi continuer à pomper frénétiquement une ressource qui appartient aux générations futures.
Notre meilleure banque est notre sous-sol, chaque calorie épargnée par des économies, à faire, par le renouvelable est une calorie pour les générations futures.

Les choix économiques inadaptés ont débouché sur l'économie de rente, la dépendance alimentaire, la vulnérabilité, la volatilité et la dépendance. L'Algérie vit, présentement et pour les quelques prochaines années, un rendez-vous avec son destin. Dit autrement, nous sommes peut-être un pays «conjoncturellement riche» mais misérablement sous-développé. Il serait tragique que l'Algérie soit réduite à un marché de 60 milliards de dollars sans sédimentation de développement. Nous ne préparons pas l'avenir, nous vivions au quotidien pendant que d'autres pays se projettent dans le futur. En 2030, nous connaîtrons des problèmes de sécheresse drastique et notre agriculture au Nord deviendrait une agriculture différente probablement saharienne,.

A titre d'exemple, l'énergie, le réchauffement climatique devraient être des axes de recherche majeurs avec de multiples retombées sur le plan des conséquences désastreuses, du point de vue de l'eau, de la disponibilité de l'énergie et de sa variété, de l'agriculture, de la sociologie des populations qui seront déplacées, mais sont superbement ignorés. Un projet structurant, le Barrage vert devrait être réhabilité. «L'avenir ne s'écrit pas dans les richesses du sous-sol mais dans les têtes», pense Jacques Attali. Que sera le monde de 2030 et comment nous y préparer dès maintenant? Quelles sont les chances de l'Algérie d'être toujours l'Algérie à cette échéance? Gouverner dit-on, c'est prévoir, plus que jamais nous devons gérer sous contrainte et profiter de cette accalmie factice de la manne pétrolière pour préparer le monde de demain. Pendant ce temps, la plupart du personnel politique aux antipodes de la réalité du monde, s'écharpe pour des places au soleil.


Les dangers qui guettent l'unité du pays

On annonce çà et là des partitions en cours dans les pays arabes. Nous avons tous en tête la partition de l'Irak en trois régions, la partition du Soudan et le chaos qui s'en est suivi; la guerre civile en Libye qui n'a plus les attributs d'un Etat, le calvaire syrien et dit-on, le projet de partition actuel du Yemen en six régions. Tout ceci est la conséquence de l'incurie arabe qui a donné lieu au Mepi (Middle East Partenaireship Inititiative).

S'agissant des nuages qui s'accumulent autour de l'Algérie, les événements de Ghardaïa ne sont pas à minimiser, nous nous souvenons avec douleur de Tiguentourine, nous croyons à tort - le discours dominant et que nous ne sommes pas concernés, que nous avons payé, que le «printemps arabe» pour nous c'était octobre 1988 et que non satisfaits de cela, nous nous sommes étripés à qui mieux mieux, pendant une dizaine d'années sous le regard indifférent de l'Occident qui comptait les points. Deux cent mille morts plus tard, nous en sommes au même point.

Nous sommes dans une situation fragile à titre d'exemple, même des pays «bien assis» sont concernés par la redéfinition des frontières qui est à n'en point douter le bréviaire des pays puissants. Méditons sur la partition en à peine une dizaine d'années de l'Irak, de la Libye, du Soudan, du Yemen, voire de la Syrie. Il y a déjà plusieurs mois que les Etats-Unis, après avoir classé l'Algérie comme «pays à risques», ont implanté des installations militaires avec contingents de marines, à la pointe sud de l'Espagne, sans cacher le moins du monde leurs intentions interventionnistes vers le nord de l'Afrique. au vu de l'état de tension régnant dans toute la sous-région, nous sommes fondés à nourrir de grandes inquiétudes.


Qu'est-ce qu'une nation?

Comment, avant toute chose, cimenter la nation algérienne. Cela devrait être de mon point de vue la priorité des priorités qui fera que nous pourrons ou non résister à l'émiettement qui nous guette. Les nations impériales ne laisseront jamais en paix celui qui a 7000 km de frontière, le premier pays d'Afrique dont 90% de la population vit au Nord et qui dispose d'immenses richesses qui, pour son malheur, mal utilisées, ont stérilisé toute création de richesse endogène.

La tentative d’industrialisation sous Boumediene, aussi discutable soit-elle était à n'en point douter une époque bénie par rapport à l'anomie actuelle qui s'est emparée de chaque Algérien qui passe son temps non pas à travailler mais à comment garder la tête hors de l'eau ayant une confiance toute relative dans ses dirigeants. Ce n'est donc pas de mon point de vue un problème de personne mais un problème de cap, d'une société fascinée par l'avenir qui fait confiance à ses citoyens, qui réveille en chacun d'eux le génie et la création de richesses tout en le protégeant contre les abus par une justice réellement indépendante et la «liberté» d'être libre de ses choix culturels, cultuels à l'ombre des lois de la République fruit d'un consensus du vivre-ensemble dans ce XIe siècle de tous les dangers.

L'écriture de l'Histoire et l'avènement d'un projet de société restent à conquérir. C'est dire que nous avons à réhabiliter l'histoire du pays, la faire assumer par tous les Algériens et l'enseigner à l'école en même temps que les fondements du vivre-ensemble. L'Algérie ne s'est jamais posée la question de savoir ce qu'elle est réellement. Sommes-nous une nation? Le jeune Algérien dont la conscience est ouverte à tout vent, du fait d'une éducation désastreuse, s'identifie au gré des vents à son quartier, à sa tribu, à son ethnie, rarement il ne se sent algérien. Sauf dans les épisodes d'euphorie footballistique. Il y a ceux qui sont encore arrimés mentalement à une sphère moyen-orientale au nom d'une arabité de la résurrection (El Baâth), il y a ceux qui pensent qu'il faut en revenir au socle rocheux amazigh maghrébin

Il nous faut plus que jamais conjurer les démons de la division et aller vers le vivre-ensemble? « La nation disait Renan, repose à la fois sur un héritage passé qu'il s'agit d'honorer, et sur la volonté présente de le perpétuer ». A titre d'exemple, tous les Mozabites, sans discrimination aucune, sont des Algériens à part entière; ils ont le droit imprescriptible d'y vivre dans la sécurité et la paix, sous la protection de la loi et du droit qui garantissent l'inviolabilité de leur vie et de leurs biens, Il n'y a pas de raison pour que ce qui a été possible pendant des siècles, ne subsiste pas dans l'Algérie devenue indépendante. Le M'zab doit continuer à demeurer l'un de nos meilleurs exemples de la concorde, qui forme le ciment de notre cohésion nationale.

.Se battre avec les armes de l'intelligence pour exister

Si on décide de se battre pour exister, il nous faut un cap mobilisateur, le système qui a prévalu depuis l'indépendance,- nous ne sommes pas là pour faire le procès- «concernant le chemin que devrait emprunter l'Algérie pour les années à venir sur plusieurs plans pour asseoir dans les faits cette transition multidimensionnelle nécessaire pour affronter les défis qui seront de plus en plus importants.

Le maître mot est l'effort en tout. La récompense du travail bien fait. Chacun devant être jugé à l'aune de sa valeur ajoutée. L'autre défi est aussi la nécessité de sortir du tout-pétrole en exploitant toutes les opportunités qui commencent d'abord, par une politique d'économie dans tous les domaines C'est aussi la rationalisation de la dépense, l'Etat devant donner l'exemple et être un Etat stratège qui laisse les initiatives s'épanouir en récompensant l'effort et le mérite.

Une formation de qualité où il faut être intransigeant sur la qualité des formateurs, est le plus sûr garant d'une défense immunitaire contre l'invasion. Un peuple éduqué n'est pas manipulable. Les possibilités sont immenses, il nous faut mobiliser l'imagination.
Les Algériens veulent la paix et la démocratie et les deux sans violence. Au-delà du bilan des quinze ans, ce qui est indéniable,c'est que la paix aussi fragile soit-elle est revenue, il est vrai que les prémices ont été confortées dans le mandat du précédent président. Ne nous berçons plus d'illusions. Les pays qui resteront faibles n'ont pas d'avenir. Nous nous battons dans des verres d'eau alors que les tsunamis nous guettent.

Reprenons-nous! Sommes-nous guidés uniquement par notre propre intérêt et l'Algérie dans tout çà? Les Algériennes et les Algériens seraient à jamais reconnaissants au président d'avoir eu la noblesse et la sagesse de sortir par le haut en laissant une Algérie en paix avec elle-même. Nous serions les plus heureux des hommes ou des femmes si dans un sursaut patriotique le président sortant décidait de veiller en bon père de famille à remettre el amana « la symbolique d’une chose précieuse- l’Algérien- dont on est le fidèle gardien » entre de bonnes mains ne préparant une succession apaisée où seule l'intelligence, la liberté la justice seraient les maîtres mots d'une future Algérie de nos rêves.

Le citoyen de 2030 vient de naître, laissons-lui la possibilité de se développer harmonieusement. Laissons- lui une Algérie viable du développement durable à l'instar de la Norvège pour ses générations, sortons de cette ébriété énergétique pour aller vers la sobriété en tout. Redécouvrons ce que l'on savait faire, remettons-nous au travail. C'est assurément la seule voie de salut si on veut gouverner avec sagesse ce pays qui a tant besoin de sérénité.

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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