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31 août 2015 1 31 /08 /août /2015 13:37

«Le scepticisme est le mal incurable des nations dont nous devons impérativement prémunir l'Algérie (...) L'équation est très difficile, nous devons optimiser nos moyens, atteindre la croissance et préserver les acquis sociaux durant les années à venir.»

Abdelmalek Sellal (Premier ministre, Réunion avec les walis 29 août 2015)

Avant-hier samedi, s'est tenue une réunion, gouvernement-walis. Après le discours du Premier ministre, plusieurs ministres ont intervenu. Dans cette contribution je rapporte les faits saillants du discours. Extraits du discours non alarmiste mais ferme sur certaines vérités du Premier ministre qui s'est dit: «La baisse des cours pétroliers sur les marchés internationaux a été brutale et soudaine. Nombre d'analyses convergent vers l'étalement de cet épisode baissier sur une période plus ou moins longue avant des remontées prévisionnelles. Le gouvernement doit dire la vérité rien que la vérité.»

« Ce conclave participe à cette démarche de transparence et de pédagogie», a admis le Premier ministre. Optimiser l'utilisation des ressources financières du pays. «Pour faire traverser cette tempête à l'Algérie(...) il faut puiser le moins possible dans notre trésor de famille constitué de nos réserves», «La conjoncture actuelle est certes difficile mais elle offre aussi une excellente opportunité d'introspection et de prise de décisions audacieuses pour construire une nouvelle vision économique et modifier nos modes de fonctionnement et de régulation.»

Un constat qui oblige le gouvernement, «à plaider pour des actions en matière de rationalisation des dépenses et le développement du marché des capitaux». Pour le Premier ministre, cette vision nouvelle d'une optimisation des ressources financières du pays ne s'inscrit pas dans une politique d'austérité: «En lieu et place de l'austérité, nous optons en Algérie pour la croissance et la relance économique», «Il vaut mieux compter nos sous mais sans faire caler le moteur économique qui soutient l'emploi et le pouvoir d'achat.» «Il ne faut ni s'alarmer, ni s'endormir, mais bouger dans la bonne direction avec ambition et courage», plaide t-il.

«Toutes ces décisions pour relancer notre économie et absorber le choc pétrolier toucheront des habitudes, des vieux réflexes et des intérêts. Elles recevront, donc, des résistances plus ou moins fortes.»

Parmi les idées novatrices, le Premier ministre a demandé aux walis de sortir des sentiers battus: «Les walis ont désormais à charge, rappelle-t-il, l'octroi du foncier industriel. L'agriculture et ses industries de transformation, le tourisme, la pétrochimie, les nouvelles technologies de l'information et de la communication ainsi que les énergies renouvelables, sont les domaines fixés par le Premier ministre comme prioritaires du développement.»

Le devoir de vérité au peuple

Le Premier ministre exhortera ainsi avec insistance les walis à impliquer «les élus locaux, de tous bords et appartenance, dans vos plans de développement de vos territoires et dans la communication avec les citoyens». Il a jugé inadmissible à juste titre, et c'est là que le bât blesse, «le fossé qui sépare l'administration du citoyen» «les walis et les élus locaux doivent, désormais, rendre des comptes aux citoyens». Plus encore, il a estimé que dire la vérité aux citoyens est l'unique voie pour gagner la confiance et l'adhésion de tous à l'oeuvre de renouveau national. «Nous devons débarrasser nos villes et nos localités des fléaux qui les dégradent comme l'insécurité, l'insalubrité et l'occupation anarchique des espaces publics,» estime le Premier ministre. Tout en avouant qu' «on a un déficit en matière de gouvernance», Mais notre principal allié dans ce combat futur sera la population si nous lui disons la vérité, lui expliquons notre démarche et si nous arrivons à gagner sa confiance». Il fait allusion de ce fait, aux dérives dénoncées souvent par la société civile et les partis politiques de l'opposition.

Le vivre ensemble meilleur ciment de la nation

J'observe que le problème le plus important, celui du vivre ensemble qui a été abordé par le Premier ministre dans le débat n'a pas été repris par les médias. Le Premier ministre a bien raison d'insister sur la diversité, sur le fait qu'un Algérien est par la force des choses sédentaire, puisque tout est fait pour qu'il ne sorte pas de sa ville ou de sa région et de faire en sorte que les Algériens se connaissent entre eux. Il nous a semblé utile d'y revenir. Avant toute chose, chaque région devra inlassablement permettre et prôner le vivre ensemble qui est de mon point de vue le premier chantier de chaque responsable. Tout doit être fait pour aboutir à cette harmonie qui fait que la République a une immense volonté d'intégration. Il n'y aura que la compétence qui doit primer à l'exclusion de tout autre critère qui a fait tant de mal au pays.

Les Algériens ne se connaissent pas entre eux. Parmi les anomalies on constate par exemple, qu'il y a des situations où un jeune naît, étudie au primaire, au lycée, va à l'université, travaille dans la même ville. Il est indifférent à ce qui se passe ailleurs. Cela devrait être revu. Le Service national devrait continuer à être le creuset du vivre ensemble, chaque région devrait faciliter les échanges. Ainsi, les universités devraient se spécialiser avec pour certaines disciplines des recrutements nationaux. Il en est de même de certains lycées qui devraient se spécialiser au moins à l'échelle de la wilaya.

C'est aussi le rôle du tourisme dont l'activité pourrait être un immense melting pot des Algériens entre eux. Quand on visite le Sud quand on vient du Nord, c'est une contribution à l'édification de la nation et nous donnons de la substance à ce qu'est être Algérien. Ce sont ce type de mesures qui nous prémunirons des dérives contre notamment le régionalisme et la tentation totalitaire.

Dans le tourisme justement, Faisons place à l'imagination. On sait que les hôtels cinq étoiles, ne sont pas fréquentés par les Algériens. Pourquoi alors à titre d'exemple, ne pas mettre en place des formules diverses comme ailleurs? Construire sur la base de modèles spécifiques à l'architecture de chaque région, des petits ensembles modestes mais contenant toutes les commodités à des prix abordables. On peut même dans ce cadre, construire des centaines de maisons de jeunes qui sont des auberges de jeunesse améliorées et qui pourraient être construites dans des endroits touristiques judicieux avec l'apport des jeunes du Service national et même des détenus qui auraient là une occasion de se racheter.

A terme, les Algériens se connaîtront ce qui serait formidable pour le vivre ensemble, c'est de fait au moins deux milliards de dollars de gagné par une diminution des vacances à l'étranger Même le sport et la culture sont concernés par le vivre ensemble. Tout ce qui peut permettre de stimuler. l'intelligence doit être constamment encouragé. Indépendamment du fait que le sport au lycée et à l'université devrait faire l'objet d'un projet d'ensemble pour mettre en place les championnats intervilles, interwilayas; inter-régions. Enfin, parmi les vecteurs du vivre ensemble, il serait bon que les wilayas et les villes du pays se connaissent. Le ministère de la Culture pourrait envisager de mettre en place les 2500 jours de la culture (48 wilayas x52 semaines).

Quels étaient les autres messages?

Le Premier ministre admet que «le chemin est difficile mais nous avons les capacités pour être un pays émergent». Pourquoi pas? Quelles sont les attentes des citoyens? Quels sont les degrés de liberté des walis, des maires en termes d'initiatives? La gestion à l'échelle d'une wilaya connaît des contraintes de tout ordre notamment de la non-implication des citoyens. Comment optimiser la ressource, répondre aux projets à réaliser et du même coup assurer une paix sociale. Cette équation à plusieurs inconnues peut être résolue en partie par un projet exposé aux citoyens pour emporter leur adhésion. Ce qui a manqué hier c'est de fixer, au-delà du cap de la rationalisation de la dépense, une feuille de route qui fait la chasse au gaspillage pour faire comme justement il a été dit «faire mieux avec moins de ressources». Cette feuille de route est subordonnée à des échéances. Le moment est venu de le faire et peut-être que la loi de finances 2016 devra le faire.


Construire utile et beau

Pourquoi systématiquement chaque année, construire des centaines de classes d'écoles des dizaines de lycées et d'université? Le bâti actuel en infrastructures devrait s'il est optimisé permettre au pays d'avoir un sursis qui lui permet de construire bien et beau. Comment? En théorie, nous n'avons plus besoin de construire d'infrastructures pour le système éducatif pendant au moins trois ans. Du fait que l'on peut optimiser le fonctionnement au moins par la double vacation à l'école, au lycée et à l'université qui ne fonctionne que 8 heures/jour.
Le raisonnement est valable aussi pour les autres infrastructures qui ne sont pas optimisées. Le gain de temps sera mis à profit par l’Etat pour améliorer la qualité du bâti et aussi donner un sursis financier au pays



Un développement durable mobilisateur

Parmi les chantiers possibles qui montrent une vision nouvelle déjà existante de par le monde, celle de mettre en place le développement durable. C'est en fait la rationalisation de l'utilisation de la ressource couplée à la protection de l'environnement et à la création de richesse. la rationalisation de la ressource; Consommer moins en consommant mieux. Préserver l'environnement. Economiser les énergies fossiles pour laisser un viatique aux générations futures.

Le citoyen est une partie de la solution des problèmes de la cité. Toujours dans le cadre du développement durable et de l'optimisation de la ressource gérée au plus juste, il pourra s'avérer nécessaire d'étendre d'une façon résolue la e-administration qui permet de gagner du temps et de l'argent. Mieux encore, dans certains pays la délivrance d'une pièce officielle (extrait de naissance, certificat de résidence...) est payante. Pourquoi ne pas instituer ces redevances qui sont des sources de financement participatifs?

Du même coup les abus vont diminuer. A titre d'exemple, la suppression à l'échelle nationale de la délivrance rituelle en début d'année d'un extrait de naissance pour les 10 millions d'élèves, est l'équivalent de 100 tonnes de papier soit l'équivalent de 20 millions de DA! Pour concevoir et mettre en oeuvre une politique de développement durable, les élus doivent se mobiliser, mobiliser les acteurs du territoire afin d'approfondir leur réflexion et construire un projet mobilisateur avec des objectifs. On se départira alors de la mentalité du beylick (cela ne me regarde pas, s'il y a gaspillage). Nous sommes tous concernés et un sou épargné est un sou disponible pour les générations futures.

L'aménagement de l'espace, le développement économique, l'environnement (l'eau, les ordures ménagères, la biodiversité, l'assainissement), la voirie intercommunale, l'habitat, le cadre de vie, les services de proximité à la population. Le développement durable interroge l'ensemble des acteurs de terrain. Le développement durable oblige à relever plusieurs défis qui participent de l'élévation de la qualité de la vie

Les défis environnementaux: la disponibilité et la qualité de la ressource en eau, la préservation de la biodiversité, la consommation de foncier, l'anticipation face à la diminution des énergies fossiles, la lutte contre l'effet de serre, La lutte contre les nuisances, la gestion des déchets... et des décharges qui sont des mines d'or qui se chiffrent en centaines de millions de dinars.

Les défis économiques: le passage d'une économie du «plus» à une économie du «mieux», le lien croissant entre agriculture et alimentation des habitants. Le but en se fixant un objectif d'économie est d'amorcer un mouvement d'entraînement de la machine sociale. Même si on n'arrive pas par exemple à l'objectif de 10% d'économie globale sur le budget, l'essentiel est de commencer.

Les défis sociaux: l'augmentation des situations de précarité, la demande sociale en logement, l'organisation de la mobilité, la prévention des risques naturels et technologiques... Toutes les compétences «basiques» des communautés ont donc un lien très étroit et très direct avec le développement durable du territoire communal et de la wilaya.

Le développement durable est aussi un levier pour aussi créer de la richesse. Il n'est que de voir comment le tri sélectif permet de récupérer, les métaux, le plastique, le verre, le papier à qui il est possible de donner une seconde vie en réduisant les importations.

Dans certains pays, chaque citoyen donne une demi-journée par mois de son temps à sa commune. La commune, en tant qu'entité vivante, implique un mode de gouvernance participatif qui s'appuie sur la concertation et le dialogue et facilite les dynamiques collectives. Le développement durable donne envie de s'impliquer. Il parvient même à cultiver une dimension «épanouissante» et conviviale en montrant une pratique éco-citoyenne, dans le travail partagé, et les challenges à relever collectivement.

Chaque willaya doit créer son poumon vert. Bannir le béton. Dans ce cadre la plantation d'arbres (un arbre par élève ou étudiant est un challenge à notre portée). L'éco-citoyenneté se décline d'abord à l'école où des matières incitant à la préservation de la nature doivent être enseignées pour arriver au niveau secondaire à un baccalauréat du développement durable et plus loin encore aux diplômes d'enseignement supérieur débouchant sur les métiers du développement durable.

Donner une seconde vie aux choses en recyclant sans acheter, en organisant des opérations de foire semestrielle, pour les échanges en favorisant des projets porteurs en consommant moins, en consommant mieux et en étant solidaire d'une commune à une autre en mutualisant des moyens lourds. Ceci est valable aussi pour les équipements des écoles, des lycées, des universités. Cela donnera une rentabilisation des moyens et un meilleur entretien. Chacun devrait faire l'inventaire de ce qu'il a pour éviter les doubles emplois et les doubles acquisitions au niveau des wilayas et des daïras.

Il peut s'avérer utile à nos futurs édiles de suivre une formation sur le développement durable qui sera certainement profitable à la cité. On pourra aussi valablement créer une vie culturelle en imposant un espace culturel et une librairie au moins par commune.

Il reste à mettre en oeuvre à marche forcée les technologies de l'Internet, du twett pour informer en direct le citoyen en l'associant, en impliquant la société civile. Nous devons donner de la vie aux stations régionales, les rendre même locales. Disposer à travers les technologies de la possibilité de mettre en oeuvre les techniques audiovisuelles de télévisions locales où les responsables rendent compte aux citoyens de ce qu'ils font. A titre d'exemple, de rationalisation et de l'économie on peut penser à éviter les réunions en mettant en oeuvre les télé conférences sans déplacer les responsables.

Cela sera un gain de temps d'argent très important, de santé, une diminution des risques d'accident et une préservation de l'environnement par la diminution de la consommation de carburants qui se chiffrent en dizaines de millions de DA. Seule une vision d'ensemble où la compétence sera à l'honneur et -en mettant tout à plat avec nos forces et nos faiblesses- permettra de gagner des challenges. Le monde bouge, l'Algérie devrait sans tarder prendre le train du progrès. Ce n'est pas une question de moyens, c'est une question de bon sens, de dévouement, du respect du bien public et de la nécessité en tant que responsable de rendre compte.

Tout le monde devrait se sentir concerné, citoyens, sociétés civiles et partis politiques. Qu'on se le dise! Quels que soient les gouvernants, les faits sont têtus. Tout retard dans la mise en place du «compter sur soi» se paiera cher s'il est différé. Seule une démarche d'ensemble permettrait de sauver l'Algérie. Après avoir été pessimiste dans l'analyse, nous devons peut-être imiter Antonio Gramsci qui propose d'agir d'une façon optimiste.

Article de référence : http://www.lexpressiondz.com/chroniques/analyses_du_professeur_ chitour/224132-la-gestion-harmonieuse-de-la-cite.html

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

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